Une mécanique bien rodée.
Drive fait partie de ces films qui laissent un goût amer. Proche de l’exceptionnel, il n’ose se contenter que de l’étage inférieur. On a envie de s’enthousiasmer, de crier au génie mais il y aura toujours ce petit défaut récurrent qui nous empêchera de le faire. Le film de Winding Refn relève au final plus du concept que de la sublime fable qu’il aurait pu être. Dommage.
Clairement ici il faut dissocier le fond de la forme. Sur le plan purement plastique, l’œuvre est resplendissante. Les plans sont très travaillés. L’univers est abouti, captivant, hypnotisant. Et le mutisme des personnages est parfaitement couvert par une symbiose entre bande sonore et image.
Donc Drive outre son esthétique c’est quoi ? C’est Ryan Gosling tantôt en pilote, tantôt en homme dur préférant jouer de ses regards plutôt que de ces mots. Car ici le dialogue se fait inexistant et lorsqu’il est présent il se fait hésitant. Il sonne faux. Comme si la communication n’avais jamais fait partie intégrante de cette homme. Il préfère les actes aux paroles. Les paroles ils ne les maîtrisent pas. A contrario de ces émotions, calculées aux millimètres. Froid, placide, il arpente les routes nocturnes. Il ne laisse rien transparaître sauf lorsqu’il fera la rencontre de la craquante Carey Mulligan. Les prémices d’un homme nouveau. Un sourire. Une émotion. Puis une impossibilité à communiquer flagrante. Une solitude qui le poursuit. Sans relâche. Puis un retour à la case départ. Vite, bien trop vite…
Délaissant ainsi ces moments de grâce, le film se plonge dans une optique nouvelle, celle de la violence subversive. La violence. La vraie. Pas forcément celle qui fera couler des bains de sang. Plutôt celle qui prend sa source dans un flegme des plus marquants, renforcé par tout le travail d’ambiance effectué en fond depuis le tout début du film. La machine est bien rodée mais c’est peut-être ici que le film s’essouffle. Dans cette démonstration purement plastique, dénuée d’émotions et parfois même d’intérêt. Une mécanique trop bien rodée en somme. Sans grosse surprise.
Le film qui avait donc démarré sur la probable évolution du personnage de Gosling se retrouve donc être un film stagnant, niant toute possibilité d’évolution de son personnage principal. Et si la nuance a tout de même évoquée sur ce qui fut la partie de l’œuvre la plus accomplie, elle fut totalement inexistante concernant les personnages secondaires caricaturaux au possible. Relevant bien plus souvent d’un concept fixe plutôt que d’une réelle âme en mouvement. Et c’est ce qui contribuera de nouveau à éloigner Drive de l’excellence.
Donc oui Drive est une réussite, c’est même un film qui roule à la perfection (Clap Clap Clap.. On applaudit le jeu de mot). Parfois peut-être trop. Mais l’expérience vaut le coup d’être vécue pour bien des raisons, le réalisateur danois imposant une empreinte bien particulière sur son œuvre. Troublante. Hypnotique.