"Drive" est l'un de ces rares films où la mise en scène et le souci du rendu filmique l'emportent sur l'intrigue. Celle-ci est déjà suffisamment alambiquée: des héros entre Bien et Mal, à vrai dire sans aucune morale dans la jungle de Los Angeles; une mignonne fille-enfant un peu perdue (Carey Mulligan), la seule qui conserve ses valeurs de vie et de probité; un rival amoureux du héros plus looser que vraiment méchant; un jeu compliqué entre les petits mafieux locaux (dont Ron Perlman et sa gueule); une métropole littorale (Los Angeles), toujours nocturne, d'un noir de réglisse étincelante de feux souvent un peu flous (décor rêvé pour des personnages sombres et pas très au clair avec eux-mêmes).

Surtout, la manière filmique est délectable. De la première à la dernière image, un continuo mélodique à la fois tendu et feutré traverse les images, les dialogues, la musique.

Les images: abondance de plans rapprochés, sans abuser du gros plan frimeur, et surtout une tendance à ralentir aussi longtemps que possible le passage au plan suivant: l'image est tenue, conservée longtemps après l'action majeure, le temps exact que le spectateur décèle l'impact de cette action sur le visage et le corps des acteurs, qui savent ne pas trop en faire. L'usage de certains ralentis se révèle particulièrement pertinente.

Les dialogues: pas un mot de trop; sans avoir l'acuité tranchante d'autres réalisations, les dialogues sont réduits à l'essentiel vital nécessaire à la compréhension. Le héros (Ryan Gosling) parle peu. Les échanges amoureux sont traités avec délicatesse, et le silence y joue bien son rôle.

La musique: choisie avec soin. A part le générique de début, qui offre une mécanique criarde sans doute censée être à l'image de Los Angeles, on apprécie la justesse de ces plages de synthétiseur qui, selon que la section rythmique se fait plus ou moins présente, oscille de la musique minimaliste répétitive style Terry Riley (Californien, tiens !) vers de l'électro franc mais retenu, en passant par des plages plus mélodiques qui peuvent évoquer Tangerine Dream. Les moments de transition ou de détente sont l'occasion de placer des chansons plus perceptibles et et enjouées.

Mets délicat, à déguster.
khorsabad
9
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le 9 oct. 2011

Critique lue 315 fois

10 j'aime

khorsabad

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