Difficile de coucher des mots sur le papier face à toute l'émotion que nous procure Drunk. Il est de ces films qui me rappellent ce que l'humain a de plus brut et en même temps de plus beau, comme l'avait fait Une vie cachée de Terrence Malick l'année dernière. L'homme est sujet à sa folie, a sa "faillite" comme nous conte cet étudiant lors de son oral de philo. La philosophie de Kierkegaard et de Nietzsche traverse tout le film d'ailleurs et fait de celui-ci une oeuvre pleine de sens, une oeuvre qui nous élève.

A travers l'alcool, ce groupe de 4 professeurs menant une vie maussade, une vie qui finalement a été vidée de son sens, va trouver le moyen de se libérer, le temps d'un verre ou sur une plus longue durée. Cette fausse liberté que procure l'alcool va peut à peut agir comme un vrai médiateur et changer la vision des protagonistes. Une libération qui aura un double penchant : problèmes familiaux, problème d'entente sociale, dépression, suicide... Il est triste de voir la force mais en même temps la faiblesse de l'homme. Ceux qui ont quelque chose à quoi ils tiennent peuvent remonter la pente car ils ont foi en la vie. Mais l'homme qui n'a plus rien ne fait que dégringoler dans un gouffre, dans l'abysse.

L'esthétique du film sera au service de son propos, une maitrise parfaite de la réalisation de la part de Vinterberg viendra faire du film un véritable chef d'oeuvre. Le jeu sera notamment mis sur la quantité de lumière, les contrastes découvrant les plis des visages de plus en plus changeant le long de l'histoire. Quand aux acteurs, je pense qu'il aurait été difficile de faire mieux, un quatuor qui incarne à merveille ce groupe de vieux amis ayant toujours gardé leur âme d'enfant qu'ils ont dû sans cesse refouler. Quand à Mads Mikkelsen, il est certainement l'acteur le plus humain que je n'ai jamais vu, restant dans la mesure, sans artifice, mais si vrai.

L'avantage de ce film c'est qu'il se fait moralisateur sans être un véritable pamphlet. Oui les drogues peuvent emmener l'homme à se nier lui même, à perdre le contrôle, mais elles sont aussi à l'origine de moment plus légers. L'être humain vivant sous le joug de nombreuses pressions, il est souvent utile de se procurer cette joie chimique qui nous permet de devenir autre. La scène finale, qui apporte une émotion si belle après tout le désarroi ressenti quelques minutes auparavant, révèle la nécessité de la fête, de l'oubli, de la libération.

MidMinder
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le 15 oct. 2020

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