Quatre amis professeurs enseignent dans un lycée où les élèves se distinguent entre autre par leur performance lors d'une compétition sportive très alcoolisée. A l'occasion des quarante ans de l'un d'eux, ils se retrouvent dans leur restaurant attitré. S'ensuit un échange sur leur déconvenue personnelle et professionnelle, au sein du tintement des verres de champagne, de vin et de vodka.


Inspiré par cette soirée bien arrosée, Nicolaj expose la théorie du psychiatre Finn Skårderud selon laquelle l'homme serait né avec un manque de 0,5% d'alcool qu'il s'agirait de rattraper pour atteindre le maximum de son potentiel. Commence alors l'expérience philosophique, sociale, scientifique et une belle aventure d'amitié. Elle se décline en trois phases, avec un degré de plus en plus fort dans la radicalité de l'expérience.


Drunk saisit par son scénario à la fois original et radical. La consommation d'alcool est montrée pour le meilleur et pour le pire. Certes, les thèmes de l'amour et de l'amitié sont en toile de fond, plus banals, mais la proposition du film les renouvelle sous l'angle de l'expérience sociale. Plus encore, il est une réflexion sur le libre arbitre. Dans quelle mesure et jusqu'où sommes nous maîtres de nos actes? Peut-on clairement démarquer la pratique des quatre professeurs de l'alcoolisme sous couvert d'une expérience scientifique?


Enfin, le lieu de l'école n'est pas anodin et se prête à ce jeu expérimental et didactique. L'école comme lieu d'apprentissage autant pour les élèves que le corps enseignant. Outre ces éléments situationnels bien pensés, le scénario original sied au jeu d'acteurs, avec Mads Mikkelsen dans le rôle principal de Martin, professeur d'histoire désabusé, mari amorphe et père de famille absent. Il en émane une complicité, une solidarité, une puissance tout à fait humaine.


Après La Chasse, qui s'attaquait au sujet de la pédophilie, Vinterberg reste avec Drunk dans le registre de la subversion, dans son traitement de l'ivresse et de ses conséquences sociales. Dans un cas, l'ivresse est salutaire pour la vie de couple ou les résultats scolaires. Dans l'autre, elle se retourne contre vous et vous fait sombrer. Malgré le sérieux du sujet, le ton est toujours accessible et léger, l'humour toujours présent.


Certes, la beuverie finale joyeuse avec les bacheliers peut être vue comme un signal osé et un parti-pris très limite au vue du scénario du film. Peut-être devrait on plus voir dans ce final une manifestation des notions de partage et de sollicitude, comme remparts contre le repli sur soi. La scène est magnifiée par la danse spectaculaire de Mads Mikkelsen sur la chanson "What a life" de Scarlet Pleasure, devenue un hymne du film.

Nuwanda_dps
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le 19 juin 2021

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Emilie Rosier

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