Tout a été dit et écrit au sujet de la monumentale saga littéraire Dune de Frank Herbet. Mais encore si peu avait été filmé. On se souvient évidemment de la version de David Lynch, de diverses adaptations télévisuelles. Puis nous avons vu aussi essaimer les idées de Jodorowsky pour Dune dans moult autres films. Cependant, aucun cinéaste n'avait encore capté l'essence de Dune lui-même. Aucun réalisateur ne nous avait fait ressentir toutes les saveurs de l'épice. Et Denis Villeneuve arriva. Nanti de ses succès (surtout d'estime et de critique) dans la science fiction avec le sublime Blade Runner 2049 et le non moins captivant Premier Contact, le réalisateur québécois a enfin eu l'opportunité de réaliser son fantasme en adaptant Dune au cinéma. Enfin, une moitié de Dune malheureusement. Warner Bros, studio frileux, attendant de voir quelle serait la réception du premier film avant de donner son feu vert pour la deuxième partie. Mais sur ce terrain, le pari semble être réussi. Tant pour la presse en général que pour votre serviteur.


Dune va vous étonner par son rythme qui se rapproche de celui de BR2049. La narration prend son temps. Les plans sont contemplatifs. La fidélité au roman semble de mise. Contrairement au film de Lynch, cette fois-ci on peut aisément saisir tous les enjeux et les antagonismes. Et comprendre pourquoi les événements arrivent. Les Atreides père et fils, seigneurs de Caladan, sont envoyés sur la planète Akkaris afin de pacifier la situation avec les autochtones, les Fremen, et ainsi, sécuriser l'exploitation de la fameuse épice, carburant indispensable pour les voyages interstellaires. Ils viennent alors remplacer les Harkonen, leurs rivaux, bien qu'alliés dans l'empire. Leto, figure paternelle un peu parfaite, répond à l'appel de l'empereur, et part avec sa suite, dont sa concubine Dame Jessica, et son fils, Paul, qui fait de drôles de rêves.


Les thèmes exploités dans cette histoire sont on ne peut plus classiques. L'écologie, à savoir la préservation du potentiel infini de la planète Arrakis. Le thème de la colonisation est également présent, ainsi que les problématiques qu'il véhicule. Enfin, nous avons bien entendu le voyage du héros et la figure messianique. Cependant, plutôt que de déployer cette histoire en usant de stéréotypes, on passe son temps à questionner ces différents thèmes. Paul est-il vraiment l'élu, celui qu'attendent les Fremen sur Arrakis ? Le fait d'accomplir son voyage de héros est-il quelque chose de positif si cela doit conduire à une guerre intergalactique sanglante ? Au gré de ses visions, toutes ces questions se posent avec de plus en plus d'urgence. Et on remarque alors avec tristesse que pour que le héros accomplisse sa destinée, il doit symboliquement (et littéralement) verser le sang.


L'approche de cette histoire est hautement intellectuelle. Les choses, bien qu'énoncées clairement ne manquent pas de subtilité. L'intention du metteur en scène ici étant de nous immerger à fond dans la planète Arrakis. Les plans qui n'arrivent pas à capter tout le décor sont donc légions, et impressionnent. La photographie sobre et désaturée donne une grande authenticité aux décors. Devant l'écran l'émotion est neutre, toutefois, les images infusent lentement tant et si bien que lorsque les lumières se rallument, on est encore sur Dune.


Même si on parle d’un empire galactique, de voyages spatiaux, de vers géants de 400 mètres de long, de déserts hostiles, le film a le bon goût de coller à ses personnages et de nous faire vivre ça avec leurs yeux. Ce sont eux qui comptent, pas le décor. Et quels personnages. Le casting étant impeccable. Timothée Chalamet en Paul soutient ce film avec une grande sensibilité, une fragilité apparente mais également, de la force et de la détermination. Rebecca Ferguson en Dame Jessica est parfaite dans son rôle de mère aux dons surnaturels. Jason Momoa est un Duncan plein de puissance et de sérénité. Chaque personnage secondaire existe et habite l'écran tant la direction artistique est maîtrisée.


Dune Partie 1 est une épopée monumentale qui donne un avant goût de la démesure où peut aller cette histoire. Notamment lorsque les vers géants s'en mêleront et que le héros accomplira sa destinée. La suite, vite ! Une fois commencé le voyage vers Arrakis, on n'a absolument pas envie de rentrer.

Andika
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le 15 sept. 2021

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