Faire un film qui se veut "réaliste" et narrant un événement marquant de la plus atroce des guerres sans pour autant être précis dans son propos est à la limite du scandaleux. Dunkerque de Christopher Nolan revient sur l'évacuation des troupes britanniques sur la plage du Nord, sans jamais mentionner les actes héroïques des français qui ont permis ce sauvetage autrement que par une médisance et des insultes. Oui, rappelons-nous que les français se sont battus jusqu'au bout et se sont sacrifiés, et pas une seule minute Nolan s'y intéresse. Terriblement dommage et regrettable.
Avec Dunkerque, Nolan s’essaie à un exercice de style en demi-teinte. Tantôt prenant, tantôt ennuyeux, Dunkerque ne décolle jamais réellement, la faute à des choix narratifs qui desservent son propos. Se focalisant sur trois axes, les airs, la jetée, et la mer, à travers trois unités de lieu, on navigue dans ces péripéties, déstabilisé par un rythme dissonant. Pourtant, le suspense, but recherché par le film, ne faiblit que rarement. Dunkerque est un survival de la guerre, mais, primo nous nous attachons à aucun de ses personnages donc difficile d’avoir peur pour eux, et deuxio, l’horreur n’est pas marquée, et cette guerre ressemble davantage à une guerre invisible qu’à de réels actes de cruauté. Enchaînant des moments où la vie semble ne tenir qu’à un fil, peu d’entre eux sont totalement captivants.
Le récit aurait à mon sens dû se découper en trois parties distinctes, le spectateur visionnant les ponts entre chacun, en commençant par la jetée, puis la mer, puis les airs. De cette manière, on ne serait pas étonné de toujours être dans cet avion, puis de retrouver des personnages sur la plage de jour, ou de nuit. On a clairement un goût d’inachevé à la fin du visionnage.
Malgré ces nombreuses erreurs, Nolan dispose toujours de fulgurances et certains passages sont géniaux (tous ceux dans les airs, la fin du film). D’ailleurs certains plans ne sont pas sans rappeler Interstellar. La photographie est réellement superbe, et les couleurs associées à la profondeur de l’image sont un délice pour les yeux.
On retrouve avec Dunkerque, les fidèles du réalisateur avec Tom Hardy, Cillian Murphy (trop en retrait) et même Michael Caine en caméo. Nolan fait le choix douteux de prendre un chanteur dans ses rangs, Harry Styles, qui n’a pour lui qu’une forme d’arrogance. La star du film est à n’en point douter Tom Hardy, charismatique comme à son habitude et j’aurai vraiment aimé voir ce personnage davantage développé.
Enfin, qui dit Nolan dit Zimmer, et force est de constater que la bande originale proposée est logique dans le propos mais pas très aboutie. Trop brute et en perdition, j’aurai aimé plus de lyrisme plutôt qu’une musique pompeuse appuyant fortement sur des images qui parlent d’elles-mêmes.
Après son chef d’œuvre Interstellar, déjà suite d’une multitude de film plus que convaincants (Inception, The Dark Knight, Le Prestige, Insomnia), Chrisopher Nolan signe son plus mauvais film, et je suis triste d’écrire ces mots. Sympa à bien des égards, on était en droit d’attendre nettement mieux de lui, réalisateur formidable qui s’est clairement beaucoup trop reposer sur ses lauriers. Entre des mauvais choix de narration, et une narration superficielle, il y avait tellement mieux à faire.
6/10.