Steven Spielberg, empereur de chefs-d'oeuvre

Les Dents de la Mer. Rencontres du Troisième Type. Indiana Jones. E.T. Jurassic Park. La Liste de Schindler. Il faut sauver le soldat Ryan. Minority Report. Inutile de vous préciser que la filmographie de Steven Spielberg regorge de chefs-d’œuvre ! Ce qui ne l’a pas empêché de « s’autoriser » quelques erreurs de parcours (Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal). Mais là n’est pas la question. La carrière de Spielberg regorge de grands films au combien mémorables, à tel point que ces derniers ont facilement éclipsé d’autres longs-métrages du réalisateur. Certains n’ayant pas vraiment marché (1941, Always) où qui sont tout simplement passés inaperçus (Amistad). L’Empire du Soleil fait partie de cette seconde catégorie. Et il est incompréhensible qu’un film aussi puissant n’est pas attiré l’œil comme il se doit (quoique la sortie d’Indiana Jones et la Dernière Croisade n’est pas été étrangère à ce constat).

Pour ceux qui s’intéressent au travail de Spielberg, ils pourront vous dire que cet homme a si longtemps traîné derrière lui l’étiquette d’ « éternel enfant ». Et pour cause, le bonhomme est notamment connu pour avoir fourni des divertissements ahurissants pour divertir et émerveiller (Indiana Jones, Hook ou la Revanche du Capitaine Crochet, Jurassic Park), ou d’en avoir produit (Gremlins, Les Goonies, Retour vers le Futur, Qui veut la peau de Roger Rabbit ?, L’aventure intérieure, Le Masque de Zorro, Transformers…). Au point d’avoir comme personnages principaux des enfants (E.T. l’Extra-Terrestre). Ils vont diront également que le cinéaste a voulu se détacher de cette image, en s’attaquant à des projets beaucoup plus matures et sérieux. Après avoir essayé par le biais de La Couleur Pourpre (et de manière peu mémorable), Spielberg décide de passer à l’âge adulte via le récit de l’Empire du Soleil. Où il suit le parcours d’un jeune garçon, livré à lui-même dans une Chine en pleine occupation japonaise. Un personnage enfantin dans une situation des plus sérieuses.

Au début, on ne sait pas trop où Steven Spielberg et son scénariste Tom Stoppard veulent nous emmener. Car, à part nous planter le décor et présenter ce petit garçon, rêveur et grand amateur d’aviation, l’introduction se révèle assez chaotique à première vue. Peu de dialogues entre les personnages, séquences montées bout-à-bout qui n’ont pas vraiment de rapport (ce qui donne un effet brouillon à l’ensemble). Mais en y regardant de plus près, vous verrez que l’Empire du Soleil est un film qui raconte par l’image. Un exemple : voir ce garçon assister à la misère et l’impuissance du monde qui l’entoure, alors que lui, tout innocent, est bien au chaud derrière une clôture (de la propriété de ses parents) ou une vitre (de la voiture). Un détail qui peut être difficile à repérer, mais qui éclate au grand jour quand le récit démarre réellement.

Dès que la Chine subit l’invasion japonaise, le film prend une toute autre ampleur. Le garçonnet se retrouve séparé de ses parents (lors d’une scène de panique). Naïf au point de croire à les retrouver chez eux, de faire confiance à un faux jeton, de croire encore à ses rêves… jusqu’à ce qu’il repense sa vie différemment, laissant de côté ses songes, préférant aider son prochain. Voulant se rendre utile, faisant ainsi de son existence une aventure. Le récit débute peut-être lentement (même trop pour certains), mais quand on voit par où ce dernier nous fait passer, nous ne pouvons qu’être séduit par tant de maturité, de puissance. Nous balançant à la figure un monde où les hommes s’entretuent sans raison, se volent, s’ignorent, se maltraitent. Et nous le dévoilant avec le regard d’un enfant qui fait preuve de bien plus d’humanité que tous les personnages réunis : respect de l’ennemi (saluant les pilotes japonais, un adolescent japonais avec qui il croise le regard et partage le sourire), l’entraide (le ravitaillement, l’opposition face à la maltraitance dirigée par le chef du camp), la générosité… Magnifique, rien de plus !

Et pour ceux qui découvriront le film, vous assisterez aux premiers pas d’un immense comédien. Un certain Christian Bale, alors âgé de 13 ans, qui illuminait déjà l’écran par sa prestance, son naturel déconcertant, son investissement (très physique !). Surpassant à lui tout seul les nombreux autres comédiens du film, adultes, qui font alors office de figurants. Aussi bien les « nouvelles têtes » de l’époque (Ben Stiller) que les grands noms du cinéma (John Malkovich). Spielberg a auditionné 400 enfants pour trouver la perle rare ? Fabuleux choix, vraiment !

Sans oublier le talent du cinéaste à magnifier chacun de ses plans (un coucher de Soleil, par exemple). À faire monter la tension (sa manière de filmer la foule au début du film renforce l’étouffement qui s’en dégage). À jouer la carte du spectaculaire pour seulement 38 millions de dollars (le bombardement du camp de prisonniers). À toujours faire confiance au compositeur de génie qu’est John Williams (Les Dents de la Mer, Star Wars, Superman, Indiana Jones, E.T.), qui noos livre ici de nouvelles mélodies d’anthologie. Peut-être pas aussi mémorables que ses compositions les plus connues, mais au combien poignantes. Avec tout ça dans le même bateau, aucune chance que l’Empire du Soleil ne vous échappe !

L’une de ses œuvres les moins populaires et qui pourtant mériterait grandement de l’être ! Avec ce film, Steven Spielberg confirmait à l’époque qu’il était capable de faire aussi bien du blockbuster de qualité que du drame pur et dur. Et d’y arriver avec savoir-faire, malgré quelques accrochages excusables (Always). Avec l’Empire du Soleil, Spielberg préparait le terrain à La Liste de Schindler, Il faut sauver le Soldat Ryan, Munich et Lincoln. Un grand cinéaste, à n’en plus douter !

Créée

le 26 mars 2014

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