Adapté d'un roman publié en 1997 par Steve Alten sous le titre "Meg: A novel of deep terror", Disney achète les droits pour en tirer un long-métrage motivé par l'appât du gain en voyant le succès de Jurassic Park et compte bien le sortir avant "Le monde perdu". Guillermo del Toro est dans un premier temps envisagé au poste de réalisateur avant de se faire remplacer par Jan de Bont, directeur de la photographie pour le compte de Paul Verhoeven, entre autres, et avec George Clooney dans la peau de Jonas Taylor. Mais l'insuccès commercial de Starship Troopers, la production en cours de Peur Bleue et les visions artistiques délirantes de Jan de Bont signeront l'abandon du projet, dont le budget avait décuplé de presque trois fois le montant initial. En 2015, Warner Bros récupère les droits et c'est au tour d'Eli Roth d'être assigné à la réalisation. Sauf que Eli Roth a l'intention d'en sortir un film Rated R et veut incarner le rôle principal. Warner lui fera gentillement comprendre que ce ne sera pas possible, le met dehors....bye bye Eli...et c'est donc Jon Turtletaub (qui?) qui viendra officiellement réaliser le film. (un yes-man)


Turtletaub n'a pas de connaissance du roman original quand on lui propose la réalisation mais il accepte sans sourciller. Il déclarera par la suite que son film sera très ambitieux, gore, surprenant et sera probablement le second meilleur film de requin de tous les temps.
Promesses tenues?


Non, clairement non. Mais il ne fallait pas s'attendre à plus. Le film a toujours été PG13, nous n'aurions JAMAIS eu de scènes véritablement gores, probablement que oui, elles ont été tournées mais il était trop risqué de les laisser dans le montage car en l'état, le film est absolument tout public. Même des enfants des enfants de 6 ans étaient dans la salle.


Passé cette déception très évidente, recentrons-nous sur le film. Que vaut ce "The Meg", paru sous le titre pathétique de "En eaux troubles".


Force est d'admettre que la première partie est plutôt réussie, on tombe dans la partie vulgarisation du livre, très minime, mais qui a le mérite de ne pas montrer le requin trop tôt. Car le requin ne pointera pas le bout de sa nageoire avant 50 minutes de film. L'introduction est par contre beaucoup trop rapide et bâclée, tentant de contextualiser le film un minimum et d'introduire un enjeu dramatique. On sent la scène tournée et montée à la dernière minute, ce que Jason Statham a confirmé en interview puisque cette scène n'était pas dans le scénario.


C'est en revanche dans la seconde partie que ça se gâte.Dès que le requin se montre, et c'est paradoxal. Parce que le bousin navigue la soupape entre deux eaux. (mdr) Si la majorité du film est très premier degré et s'apparente à un ersatz XXL de Jaws, d'un autre côté le film est bourré de punchlines bateau (lol) et d'un humour Marvelissant très forcé. Il y a deux personnages qui ne sont là que pour sortir des blagues. Et toutes les blagues sont du même registre, c'est à dire des petites piques machistes/misogynes -mais pas trop quand même- se terminant toujours par "bien vu", "c'est pas faux"..Les séquences d'action se veulent fun, elles le sont en partie, mais elles manquent concrètement de tension et de piquant pour qu'on puisse y adhérer.


Et c'est ça le gros point noir car quand on se la joue autant premier degré alors autant faire monter la tension. Mais elle n'arrive jamais. Les personnages ne sont jamais trop loin de leur zone de sécurité, le requin ne semble pas si menaçant et dangereux -suffit juste de le laisser tranquille- et les sidekicks désamorcent tout avec des blagues.


Les personnages, d'ailleurs, sont des archétypes de la pire espèce à peine développés. Jason Statham joue un scientifique rongé par les remords de la perte de deux hommes, renié, moqué, chassé pour sa prétendue "folie" par tous et tout cet enjeu est résumé par une scène dans laquelle Statham, en pancho et avec sambrebo, sirote tranquillou des bières chez lui. La philosophie du personnage est également limite. "Ce qui compte ce n'est pas les gens qui sont morts, ce sont les gens que je dois sauver", ou quelque chose comme ça.


Les autres personnages sont transparents et leurs rôles sont évidents (Untel est le milliardaire qui ignore la portée de son investissement, untelle est la femme forte qui tombe amoureuse- mais pas trop- du héros, beau, fort et musclé, untel est le gars lourdeau de la bande, untel est le cerveau, etc..)


Pourtant, il y avait du potentiel. Certaines séquences semblaient briser la zone de confort de nos héros mais elles tomberont à l'eau (ptdr) car elles interviennent trop tard ou non plus d'utilité à ce moment-là. La fameuse scène sur laquelle s'axait toute la promo du film (La plage Coréene), beau pétard mouillé (...) encore une fois car sur les quelques milles figurants, 2 ou 3 personnes grand max y passeront. Faisant grimper le bodycount du film au nombre incroyable de 5 morts.


Le film ne surprend pas, et ne dépasse pas nos attentes car il est pensé pour être un blockbuster de l'été, familial, et dont la cible est principalement la Chine (car c'est une co-production Chino-Américaine, ce qui explique l'absence de bodycount pour la scène de la plage...zéro couilles donc.)
Avec du gros requin, un Jason Statham qui fait le taff, de l'humour à la Disney, un peu de péripéties mais sans frayeurs. Le film ne semble pas être du tout assumé, en résulte la scène finale, qui n'est même pas ouverte, et sans scène post-générique.


Pourtant le film a cartonné et a rapporté en deux semaines 320 millions $ à l'internationale, alors que tous s'attendaient à un flop conséquent. Et il n'est pas prêt de s'arrêter là. Succès surprise mais pas entièrement mérité tant le film est vain, et n'apporte aucun plus-value, restant le sympathique blockbuster qu'il est, un peu prétentieux sur les bords (...) car il ne livre jamais la marchandise. Ce n'est pas une purge monstrueuse mais ce n'est pas un bon film non plus. Tout juste moyen et conforme à ce qu'il est.


Le long-métrage n'est pas encore sorti en France mais je conseillerai à mes lecteurs qui ne l'ont pas encore vu de ne pas regarder la bande-annonce avant (car toutes les scènes avec le requin sont dedans donc on peu dire que le film est (dans) la bande-annonce) et la 3D à la fâcheuse tendance de réduire les proportions à l'écran, un comble, donc évitez le film en 3D.


Mais alors, pourquoi la note de 6?
Eh bien pour plusieurs raisons;
- Déjà, dans l'espoir que les producteurs sortent un jour le Director's Cut en DVD.
- Parce que les suites (et il y en aura) se lâcheront peut-être et nous dévoilerons des battles de monstres marins géants (comme dans les livres)
- Pour que la saga littéraire connaisse également un petit succès dans l'espoir de voir les suites arriver dans nos librairies.
Si le roman original vous intéresse, procurez-vous la chose, c'est beaucoup plus gore/WTF que le film, une sorte de croisement entre un Chrichton et un Spielberg sous stéroïdes.
Pour se procurer le roman c'est ICI


Et pitié, que le titre de la suite ne soit pas "en eaux encore plus troubles"...

QuentinDubois
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le 19 août 2018

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Quentin Dubois

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