Enragés par cherycok

Les remakes, ce n’est pas que pour les américains, même les français s’y mettent ! C’est le cas avec Enragés (2015) de Eric Hannezo, dont c’est le premier film, qui est une relecture de Rabid Dogs (1974) de Mario Bava, le titre international de Enragés étant d’ailleurs Rabid Dogs. Assassiné par la presse spécialisée le trouvant trop aseptisé, hyper stylisé, formaté pour le marché mondial, ridicule et ringard pour certains, il faut avouer que certains textes font des reproches qui au final sont assez vrais. Pourtant, tout n’est pas à jeter dans Enragés, bien au contraire. Oui, il y a plein de choses qui peuvent faire tiquer les plus intransigeants, mais lorsque le cinéma français s’essaie au cinéma de genre, et ce n’est pas souvent, il faut au moins souligner l’effort de se voir proposer quelque chose de différent des habituels drames larmoyants et comédies bien potaches.

Dans le but de « ne pas inscrire l’intrigue dans une réalité reconnaissable et recréer un univers plus neutre, sans repère de lieu pour le spectateur », Enragés a été tourné au Québec, mais excepté François Arnaud, l’intégralité du cast est française. Et pour rendre ses personnages moins « salauds » selon le réalisateur, alors que c’est le cas dans le film d’origine, celui-ci a choisi des acteurs aux visages bien plus humains. Pour le coup, c’est vrai qu’on n’a pas l’habitude de voir des gens tels que Franck Gastambide (Les Kaïras, Toute Première Fois), cantonné aux comédies franchouillardes, dans ce genre de rôle plus froid, plus violent. Et au final, ça passe très bien. Certes, les personnages sont assez caricaturaux et certaines de leurs réactions pourront paraître des plus étranges, mais malgré quelques faux pas (vive le surjeu !), ils s’en sortent avec les honneurs, tout particulièrement Lambert Wilson qui campe ici un personnage dont on ignore tout.
Niveau mise en scène, les reproches qui sont faits par la presse sont assez vrais. Tout est très stylisé, jusque dans le générique d’intro, avec énormément de filtres de couleurs, et une façon de filmer à l’américaine. Néanmoins, ça passe là aussi très correctement car ça colle parfaitement bien au genre, le tout appuyé par une bande originale tout en musique électronique façon Kavinsky.

Malgré des passages un petits peu longuets, les 1h29 passent comme une lettre à la poste. Enragés démarre sur les chapeaux de roue en nous plongeant directement dans un gros gunfight suivi d’une course poursuite, et l’ensemble est très agréable. Le film se calme un peu par la suite mais suivre les péripéties de ces quatre apprentis braqueurs un peu dépassés par les évènements qu’ils vivent se fait sans mal, les pointes d’action disséminées ci et là venant relancer l’intérêt de manière efficace dès que le rythme retombe un peu. Le scénario est assez faiblard, il faut dire qu’on suit uniquement la cavale de ces braqueurs durant quelques heures et que du coup il est assez difficile de développer une vraie histoire et des personnages conséquents, mais alors que le film dans son ensemble est au final assez banal, la fin complètement inattendue vient directement relever le niveau. On voit souvent venir les twists à des kilomètres, mais j’avoue que là, je me suis fait piéger comme un bleu. Le film prend une toute autre ampleur, on repense à certaines scènes qui pouvaient sembler futiles lors du visionnage mais qui prennent pour la peine un tout autre sens, rendant pour le coup un des personnages bien plus électrisant et intéressant.

Enragés est une chouette petite bobine qui ne mérite pas le tabassage qu’il a pris dans la presse spécialisée. Parfois macabre, parfois palpitant, en tout cas très « différent » de la production cinématographique française habituelle, un film rempli de défauts mais tout de même très surprenant.

Critique complète avec images et trailer : ICI