10 raisons plus ou moins bonnes d'aller voir ou de ne pas aller voir Éperdument.

Parce qu'on a tous différentes raisons d'aller ou de ne pas aller voir un film, voici un florilège des meilleurs arguments, courts et teintés d'humour, pour vous mettre l'eau à la bouche et le feu aux fesses (d'Adèle).



Pourquoi aller voir Éperdument ?



Adèle Exarchopoulos (de la Nudité-Française)
Elle détruit tout sur son passage. Qu'on l'adule ou qu'on la déteste, elle est le cœur de tous les films dans lesquels elle passe. Elle pleure, elle hurle, elle se tait, elle est vulgaire, admirable, admirée surtout, Adèle est une raison à elle seule d'aller voir un film, de l'apprécier ou de le détester. Désormais enfermée dans un carcan dont il faudrait qu'elle se défasse plus tard, notre wesh-wesh des cœurs incarne, quelques temps après La vie d'Adèle, encore à la perfection le symbole de la passion amoureuse. Éperdument. Elle bouffe la caméra des yeux, elle est intense, rude, sexuelle, elle est la raison d'être du film à elle toute seule.


Les fesses d'Adèle Exarchopoulos (de la Nudité-Française)
Ce n'est plus un secret pour personne, ses fesses entreront dans le Guinness Book des records très bientôt. En attendant, qu'elles soient écrasées dans un jean trop serré ou totalement nues, elles vous raviront du début à la fin, feront chavirer le cœur des plus romantiques et le corps des plus pragmatiques. De là à dire que la dessaper toutes les cinq minutes apporte au récit, c'est un pas que beaucoup de féministes ne franchiraient certainement pas... A raison ?


Guillaume Gallienne (de la Virilité-Française)
Nous reviendrons sur le côté "négatif" de sa performance plus tard. Pour les points positifs, Guilaume semble très à point (référence cinématographique de niveau 99+), désormais, et la barbe y est pour peu de choses, au final. Il est surprenant, sans être transcendant, vilipendé comme tous les acteurs par la grâce volcanique d'Adèle (qui rappelle par ailleurs tellement l'autre Adèle, Haenel), mais il s'assure une zone de confort avec un personnage volontairement de plus en plus pathos. Il ne fallait pas un gros dur pour incarner ce rôle, et Pierre Godeau a fait un excellent choix en jouant sur l’antagonisme du garçon. C'est une vraie belle performance pour l'acteur, pourtant loin d’être acquise pour ma part.


Des portraits de famille intéressants.
Même si le film ne se porte pas sur cet aspect-là, force est de constater qu'il est intéressant de montrer deux images opposées de la famille. Le personnage d'Adèle, son père absent et sa mère à côté de la plaque et le personnage de Guillaume Gallienne, qui semble tout avoir, tout posséder, et recevoir tout l'amour dont il a besoin. Certes éculés, ces portraits de famille permettent au mot passion de s'éprendre des personnages et d'accaparer tout leur univers, elle détruit tout sur son tracé, c'est une évidence qu'il fallait mettre en scène et ce fut le cas.


Pas qu'une simple histoire tendue de barreau.
Sans vous révéler la fin du film, on comprend toute la complexité de la prisonnière et on se met alors à douter de l'étendue de tout cet amour. Il se pointe comme il se tire, brusquement, immoral, sans laisser de repères ni de certitudes, il suffit d'un sourire pour vous soustraire à la réalité ou, au contraire, pour vous déchirer le cœur. Alors, manipulation réciproque ou réelle histoire de love ? On ne saura probablement jamais. Qu'en est-il de nos fougues à nous, qui mêlent un besoin d'attention primaire et un amour sincère pour l'Autre ?



Pourquoi ne pas aller voir Éperdument ?



Guillaume et Adèle, un duo qui prend l'eau.
Si l'idée est admirable à la base, celle de réunir deux philosophies de jeu que tout oppose, le rendu final nous laisse un peu sur notre faim. N'étant pas objectif quant à Adèle, je ne saurais douter d'elle un seul instant. Le problème résiderait-il du côté de Gallienne ? Il brille par ses différentes interprétations mais semble, parfois, tellement happé par l'aura d'Adèle qu'il perd un peu de la superbe dont les yeux d'Adèle sont épris. Pour être plus clair, tout le monde dans ce film semble croire à cette idylle sauf le spectateur. Trop différents, ils en deviennent caricaturaux tant la mélodie est bancale et leur amour improbable. Curieux.


La vie d'Adèle - Chapitre 2.
Il est une certitude dans ce film. Celle du réalisateur d'avoir voulu, dans sa démarche cinématographique et scénaristique, reprendre le thème principal de La vie d'Adèle (qui n'est pas l'homosexualité mais la déraison amoureuse) en y ajoutant les mêmes ingrédients. Des personnages que tout oppose qui tombent follement amoureux, peu importe l'environnement et l'entourage, la force de frappe de la passion, la transgression dans un cadre donné, la folie amoureuse, la performance d'Adèle. Adèle Exarchopoulos est un réel diamant, pas encore taillé par les affres du drame scolaire et ampoulé, et il faut en profiter. Je trouve cependant que le réalisateur singe trop son personnage dans La vie d'Adèle. La même aura sexuelle, le même phrasé, la même fougue sexuelle (des baisers langoureux, une langue qui sort telle une bête assoiffée, etc), les mêmes plans sur son corps dévêtu, il ne manquait plus qu'une jolie petite minime dans son postérieur. Et qu'on ne vienne pas me dire que c'est la faute d'Adèle, et que "c'est simplement son jeu" ! Ce serait mépriser le reste de sa filmographie, où elle est capable d'autres choses, et déresponsabiliser le réalisateur qui, jusqu'à preuve du contraire, est encore celui qui dirige les acteurs. Qu'on soit d'accord, cela ne me dérange pas et j'ai pris un plaisir fou à voir une Adèle Exarchopoulos s'embraser d'une passion viscérale, mais j'aurais aimé voir un propos derrière, plus qu'un simple film écrit "après" La vie d'Adèle. Adèle se suffit à elle-même, elle pourrait avoir un césar sans toi mon vieux, mais c'est tout aussi sympa de faire un film qui ne tient pas que sur ses épaules, ne trouves-tu pas ?


L'univers carcéral, lol ?
Vous n'avez même pas besoin de regarder Un Prophète pour comprendre qu'il s'agit ici d'une vaste arnaque. Ce n'est qu'un décor en carton-pâte, une astuce plus ou moins maligne pour donner aux deux amoureux l'immoralité nécessaire au film et la subversion toute relative. La vie en prison est peu décrite, et quand c'est le cas elle est étouffante de bêtise et de maladresse. Soit on utilise le cadre et on le raconte, soit on utilise le cadre sans essayer d'y ajouter un peu de relief. C'est pathétique, à peu près tout autant que leurs premières rencontres, qui auraient dû être mieux filmées et plus organiques. Surtout plus cohérentes et réalistes. Au final, Adèle nage seule dans un océan de sexe dont elle est l'égérie. Elle fait des fellations au lieu d'utiliser Excel, normal, car en prison on fellationne où on veut et quand on veut.


Le couple marié qui, snif, ne se retrouve plus.
Comme pour l'univers carcéral, soit on s’attelle vraiment à montrer les conséquences d'actes sur le couple, à la Blue Valentine, soit on mise tout ou presque sur les amants et on ne fait subir les répercussions qu'à la fin, et en grandes pompes, à la manière d'un Breathe In. Ici, il ne se passe rien. Elle le découvre, elle est calme, il dort sur le canapé, il change sinon il va habiter ailleurs, il manque le spectacle de sa fille. On croirait à une blague d'un scénariste qui voudrait faire capoter un beau film sur les ébats langoureux d'Adèle. Mais c'est une réalité.


Secret Story.
Aussi fou que ça puisse paraître, Secret Story apparaît plusieurs fois à l'écran. Délire total de la production de vouloir confronter les personnages du film à cette télé-réalité, ou ruse habile s'agissant de mêler la réalité à un fantasme éphémère et utopique où la vacuité des sentiments est totale ? Si l'idée est bonne et rappelle l'histoire d'amour artificielle et télévisuelle d'Acide Sulfurique de Nothomb, le constat est beaucoup moins rassurant, car citer ce programme ne s'imposait pas. Pire encore, j'ai reconnu Jessica et son piercing sur la tronche, en train de parler du secret d'une blonde qui m'énervait à l'époque. Je ne regardais pas, mais j'ai une petite sœur qui regarde (c'est toujours ce qu'on dit.).


Pour conclure, Gallienne avec une barbe ça le fait et c'est chou, la poitrine d'Adèle oui on la voit donc allez au cinéma mater ça en grand avec votre famille, et oui vous pouvez vous laisser tenter par Éperdument, en prenant en compte le fait que si, d'habitude, vous êtes hermétiques à mes positionnements sur le cinéma français, vous n'aimerez pas ce film. Donc n'y allez pas ou alors allez-y.
Putain, finir une critique sur une telle phrase, c'est quand même fort de café. Mais vous vous laisserez bien tenter par le verlan d'Adèle et sa bouche semi-close, comme une Kristen Stewart des très grands jours, comme un carambar goût cactus.

EvyNadler

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