Ridley Scott est une énigme. Sa filmographie ressemble à un encéphalogramme survolté. On atteint des sommets de Cinéma avec " Blade Runner " ou " Alien " pour mieux dégringoler avec " Robin des bois " ou " Prometheus ". C'est tout de même prodigieux d'arriver à manier le génie et le médiocre avec autant de facilité.


Mais revenons à notre Exodus. Une déception, j'en ai bien peur. Je l'attendais avec impatience car le péplum pour le coup est un genre qui lui va plutôt bien à notre britannique, mais tout en gardant au fond de ma tête la liste des ses trop nombreux ratés. Le problème à mon sens est que ce film est beaucoup trop lapidaire. Le récit biblique, pourtant riche, est expédié à vitesse grand V. Rien n'est expliqué, explicité, les enjeux demeurent obscurs et les personnages creux. La complexité de la relation entre les deux frères n'est jamais rendue et leurs scènes d'affrontements rhétoriques sont vraiment poussives.
C'est tout de même un comble pour un film d'arriver à être si parcellaire alors qu'il dure près de 2h30 ...


Mais tout n'est pas à jeter dans Exodus. La photographie est classieuse et les décors impressionnants. La meilleure partie est sans conteste la restitution des fameuses 10 plaies d'Egypte. La scène des crocodiles en frénésie sur le Nil est à la fois belle et terrifiante. Mais encore une fois, les catastrophes se succèdent tellement rapidement qu'elles n'ont pas le temps de rendre compte du désespoir grandissant parmi la population.


Ce film laisse au final un sentiment d'inachevé, comme un long texte à trous ou se serait au spectateur de finir le travail en remplissant les cases vides avec son imaginaire. Un gâchis certes, mais qui pourrait peut-être être sauvé, je m'explique ...


Kingdom of Heaven souffrait exactement des mêmes problèmes qu' Exodus. Le film sonnait vide car Ridley Scott ne filmait qu'a la surface de l'histoire. Les personnages étaient désincarnés et le souffle épique ne prenait jamais vraiment. Il aura fallu attendre une director's cut quelques années plus tard pour rendre justice au film. Cette version rallongée de 40 minutes comblait habilement les manques et donnait enfin de l'épaisseur à ce Moyen-Orient épuré.


Je ne sais pas si Ridley Scott a prévu de sortir une version étoffée d' Exodus, mais je ne peux m'empêcher de penser que le film en sortirait grandi. Rajouter des scènes pour densifier toute cette épopée, donner enfin du liant à cette suite d'événements tragiques. Alors peut-être, je pourrais être convaincu par le récit de Scott et dieu que je le souhaite !


Parce qu'au moment même ou j'écris cette critique, vole toujours au dessus de ma tête un petit origami de papier. L'espoir que le destin d' Exodus n'est soit pas terminé.

Liverbird
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le 23 mars 2015

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