Par Yal Sadat
« Comment vendre de la merde à des cons » est le titre originel de cette entourloupe roublarde, pavée de zones d'ombres et sujette à toutes les spéculations. Sybillin comme le logo d'un street-artist coincé entre deux pubs géantes, le film intriguait à sa sortie : docu ou fiction ? Banksy, le graffeur sans visage, est-il vraiment l'auteur de ce fourbi ? Les témoignages sont-ils des faux ? Le buzz fonctionne, sans que grand monde sache où l'ovni veut en venir - si bien qu'on soupçonne la tartufferie gratuite. Alors, joli coup gadgétique ? Oui, parfaitement : et c'est la beauté du « documenteur » - réussir un beau canular pour dire que tout est gadget, tout est canular, et que les chantres de l'art « authentique » sont des charlatans ou des naïfs. C'est le meilleur service qu'on pouvait rendre au street-art, philosophie du non-étiquetage par excellence, détachée du langage et des définitions.
Exit through the gift shop, c'est donc un jeu de piste dont on pourrait tirer moult adjectifs aux préfixes en « méta ». Officiellement, c'est un film de Banksy, à propos de l'homme qui tournait un film sur Banksy ; le faciès obscurci et la voix modulée, le fameux graffeur (ou bien un imposteur ?) explique : « J'ai réalisé que Thierry était plus intéressant que moi, alors j'ai décidé de monter un film sur lui, et à l'inverse, lui s'est mis à faire du street-art ». Le film se compose d'images soi-disant tournées par ce Thierry, un Français installé à Los Angeles, sorte de Jonathan Caouette de carnaval qui filme compulsivement son quotidien. Un beau jour, l'hurluberlu copine avec le petit monde du street-art, les « Space invaders » et autres « Shepard fairey » (l'auteur du logo « Obey »). Puis il se pique à son tour d'installations au pochoir : interviennent alors des témoignages de street-artists sur l'évolution de la carrière pathétique mais enchantée de Thierry Guetta, aka « Mr. Brainwash » (!), qui, sans aucun talent, réussit à incruster son flou artistique dans les galeries huppées de L.A. Si tout ou presque semble être du chiqué, la trame s'inspire tout de même d'une expérience vécue : un cinéaste suisse aurait réellement approché Banksy pour un docu intitulé Life remote control, ici intégré aux bonus du DVD. (...)
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