Entre ordinaire et extraordinaire
6e film des frères Coen, Fargo tire son histoire d'un véritable fait divers. C'est en tout cas ce qu'annonce les premières minutes du film avant de se rétracter le générique de fin venu. Première (ou dernière) d'une série de canulars qui préparent le spectateur à l'humour corrosif des frères cinéastes, cette comédie est l'un des archétype de leur filmographie. Contant l'histoire d'un homme qui tente de faire assassiner sa femme, Joel et Ethan Coen font perdurer le besoin scénaristique de se faire confronter des personnages ordinaires à des des situations qui sont, ou deviennent, extraordinaires.
Dans la même tradition tout est symbolisé par ce paradoxe de situation, on alterne les dialogues les plus abscons aux scènes les plus hallucinantes, Tout indique une volonté de mettre en abyme la propre situation du spectateur, par nature routinière, à la magie singulière du cinéma. La psychologie et la personnalité des personnages va dans ce sens ; stupides, maladroits, désorganisés, ils sont un véritables pied de nez aux représentations régulières de la figure du méchant et de l'anti-héro. C'est dans ce cadre atypique mais récurent chez les cinéastes que William H.Macy et Steve Buscemi s'amusent à développer l'humour noir écrit de main de maître par les frères scénaristes. Chaque scène appuie la dérision, chaque dialogue souligne la caricature, la farce est totale mais souffre de ses premières intentions. A trop vouloir jongler entre les contradictions scénaristiques le rythme s'emmêle, à vouloir parodier le banal le film le devient, l'intérêt s'endort et le film perd de son attrait. La farce tragi-comique prend heureusement le dessus, Fargo tenant son fragile équilibre des nombreuses fulgurances de son écriture sérieuse et inspirée.
A la fois mordant et victime de ses procédés, Fargo est une agréable satire du cliché criminel. Souvent drôle à travers ses personnages atypiques, Joel et Ethan Coen s'extraient principalement par la qualité du script original à la valeur si manifeste qu'elle donnera lieu, 18 ans plus tard, à une mini-série du même nom. Inspirant, dorénavant inspiré. Vous avez dit génie ?