Qui se trouve derrière l’homme du 21 juillet 1969, derrière celui qui est resté dans l’Histoire pour être le premier à avoir mis le pied sur la Lune et pour sa phrase « C’est un petit pas pour l’homme, mais un bond de géant pour l’humanité » ? C’est le parcours de ce pilote ingénieur recruté au milieu des années 50 par la NASA qui est évoqué sur une petite dizaine d’années dans First Man. Sa vie professionnelle, mais aussi sa vie de couple et de père, meurtrie par la perte d’un enfant et par les drames qui se succèdent sur les projets de la NASA. En somme, la petite histoire plutôt que la grande histoire. Et c’est bien là tout l’intérêt de ce film qui dérive de l’orbite bien établie des biopics filmés à la façon des documentaires : First Man est davantage un portrait introspectif d’un homme simple, presque un anti-héros, dans la mesure où Neil Armstrong est un travailleur acharné plus qu’un être doué d’un talent intrinsèque, un ingénieur confirmé et un pilote de sang froid.
La réussite de Damien Chazelle avec First Man est de ne pas tomber dans les poncifs maintes fois utilisés pour les films de genre spatial et les écueils du patriotisme béat : le Neil Armstrong incarné (à la perfection) par Ryan Gosling est froid et peu loquace, complètement fermé dans les conférences de presse à l’inverse d’un Buzz Aldrin (Corey Stoll) qui ne rechigne pas à son heure de gloire, pas d’images grandiloquentes et héroïques (ce qui vaudra d’ailleurs à Chazelle une mini polémique aux États-Unis pour ne pas avoir filmé le planter de drapeau)… Le réalisateur préfère rester à même l’humain, y compris dans les scènes spatiales, d’une tension parfaite. Les gros plans sur la visière des scaphandres sur les boulons et tableaux de bord et habitacles d’une autre époque, enferment le spectateur dans l’habitacle de la fusée et offre un spectacle, une mise en scène claustrophobe et virtuose.
Le tout reste un peu long, mais comme toujours avec Damien Chazelle visuellement bluffant.