Le plus grand accomplissement de l'homme, un point c'est tout !

Sang froid : « Maîtrise de soi qui permet de ne pas céder à l'émotion et de garder sa présence d'esprit »


First Man est l’histoire d’une conquête froide, d’un astre mort, à la fois si près et si loin, un astre qui nous toise de sa grâce blanche et sereine. C’est aussi l’histoire d’un homme froid, au calme sidérant qu’il en devient inquiétant. Finalement, First Man est le récit d’une histoire d’amour entre la lune et son premier conquérant. Ils étaient fait l’un pour l’autre, ils se ressemblaient et ont tout fait pour se rencontrer.


Damien Chazelle a une filmographie quasi parfaite depuis ses débuts. Après un Whiplash nerveux et sensationnel, un La La Land émotionnellement incroyable et visuellement stupéfiant, First Man sonne comme un vrai test. Le défi est de taille : raconter le parcours de l’un des plus grands hommes de l’humanité : le premier homme à avoir marcher sur la Lune.


Autant dire de suite que c’est une grande réussite car Damien Chazelle le fait avec une forme de « froideur » qui colle parfaitement à Neil Armstrong. Il a totalement centré son film autour du héros, les autres personnages ne font que graviter. Même sa femme, même ses enfants ne sont que des points gravitant autour son irrésistible rencontre avec l’Astre. Son véritable amour, sa quête inéluctable.


Froid mais non sans émotion. Ce portrait est rempli d’émotion.


L’émotion de la conquête via des scènes titanesques dans l’espace. D. Chazelle apporte toujours un soin particulier à la scène d’ouverture, celle de La La Land était un chef d’œuvre à elle seule, celle de First Man nous transporte immédiatement là où l’on veut être, dans l’espace. On est capté, on comprend de suite qu’Armstrong est un homme froid, on comprend aussi le chemin titanesque qui sépare l’homme de la Lune. Cette émotion de la conquête, on la ressent aussi par les pertes mais surtout quand Neil sauve, à lui seul, le programme spatial de la NASA alors que tout le programmait à mourir dans l’espace. La scène est grandiose de tension, visuellement phénoménale.
L’émotion aussi via sa place parmi les hommes. First Man est aussi le portrait d’un mari, d’un père et cela donne une profondeur insoupçonnée à cette ingénieur finalement assez fade et pas nécessairement charismatique. C’est un homme pragmatique, calme, plat…voir ennuyant. Il n’a rien d’un héros, il n’a rien d’un grand homme, et pourtant…et pourtant ! Mais malgré tout, Claire Foy, sa femme, héros ou pas héros, le ramène sans cesse à son rôle de père et de mari. Et même quand elle le pousse dans ses retranchements, face à ses enfants, l’ingénieur reste l’ingénieur « D’autres questions ? » dit-il à ses enfants avant son départ. Froid.


Froid et pourtant on ressort de la projection avec des étoiles dans les yeux et avec l’impression d’avoir fait le voyage avec Neil. Damien Chazelle nous amène souvent à être à la place de Neil. Déjà Merci ! Quel pied ! La conquête nous concerne sans cesse, quand Neil doit deviner où se trouve Agena, on cherche avec lui, quand l’équipage attend que la Lune se découvre dans la lucarne, on attend avec eux. C’est profondément immersif et à la fois bouleversant…de se dire que finalement…on n’aura jamais été si proche d’eux. Si loin si près.
Autre parti pris fort de D. Chazelle c’est l’imagerie mise en place tout au long du film. Outre les décors, les couleurs et sa réalisation renforcent un peu plus l’aspect « époque » du film.
En fait…même si c’est 50 ans plus tard, on l’impression d’y être.


La réalisation de D. Chazelle est simplement parfaite. C’est déjà un patron, il transforme tout ce qu’il touche en or. First Man était clairement un projet casse-dent, c’est devenu un très très beau film qui permet, encore une fois, de montrer que Ryan Gosling sait tout faire ! TOUT ! Il sait chanter, danser, faire rire, faire frissonner. Il a cette capacité folle à transmettre des émotions avec peu, un regard, une attitude. Et maintenant, il a même marcher sur la Lune.


D’ailleurs je pense que toute la réalisation et la mise en scène autour de la quête finale est simplement parfaite. La musique, les plans sur la Lune, l’Alunissage et sa tension dingue, Karen, le petit con de Buzz Aldrin extraverti, les bruits du vaisseau rappelant la vétusté irréelle du matériel…et les retrouvailles avec Janeth. Pas un mot, la tension est folle entre les deux. Ces retrouvailles, c’est un sommet du film tant les deux ne savent pas quoi se dire : l’un vient de réaliser le plus grand accomplissement de l’humanité, l’autre voit surtout un mari distant.


Le film est composé d’un tas de second rôle et de tête connue qui font tous le job. Avec simplicité. Mais Neil Armstrong est le seul à être d’intérêt, le reste ne fait que graviter.


Finalement, Damien Chazelle confirme qu’il sait tout faire, Ryan Gosling qu’il sait tout faire, Justin Hurvitz confirme qu’il est un excellent compositeur, Claire Foy confirme qu’elle est promise à faire de très belles choses…Finalement…ce film était promis à être une réussite, comment en douter ?


On en ressort transporté, avec des yeux d’enfants devant notre plus grande conquête, admiratif d’un homme et de toute une équipe de bricoleur qui a cru en l’impossible. Rien n’aurait été possible sans la froideur d’un homme et d’un seul. Cette rencontre entre Neil et la Lune était la Providence, ils étaient fait pour se rencontrer, pour l’Histoire, pour l’Humanité et surtout, pour Karen.


Merci

Halifax

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5
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Chazelle se loupe avec cette évocation froide et ennuyeuse d'où ne surnage aucune émotion.

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