Etonnant de constater à quel point Memento (le deuxième film réalisé par Nolan, qu’il me faudrait revoir, tout de même) n’est en fait qu’un copié/collé de son tout premier, Following. Rien de désagréable. On navigue entre le polar et l’introspection d’un suiveur suivi, variation autour du thème de l’arroseur arrosé, construction en puzzle où le puzzle s’avère complètement vain si ce n’est dans l’espoir de perdre le spectateur pour mieux lui tendre la main ensuite car déjà, Nolan est fasciné par cette espèce de facétie auto-satisfaite selon laquelle la magie avec laquelle il délivre les clés de son récit importe finalement plus que le récit lui-même, voire la mise en scène elle-même. Chez Rivette (Le coup du berger) par exemple, c’est évidemment tout le contraire, il y a des idées et la réussite du film ne tient pas qu’à son assemblage. Quand on y réfléchit, Following de façon linéaire, n’a plus les mêmes objectifs. Le spectateur serait bien trop libre. Néanmoins, je trouve cela correct car ça ne vise pas à être grand, c’est bourré d’énergies (et de tics, aussi) et tellement représentatif en mode mineur du futur cinéma de Nolan : importance des objets (une boucle d’oreille comme paradoxe, future toupie de Inception), goût évident pour le puzzle (déformation physique saccadée, tempo central de Memento), construction en pièges (le polar à la Insomnia). Nolan est un petit malin, un faiseur au sens petit magicien (Le prestige, bien sûr) qui aime embarquer le spectateur dans ses tours, lui en mettre plein à la vue, petit monde éternellement adolescent, déjà parsemé de petites (auto)références (le curieux logo Batman sur une porte, magie d’un devin). Ça aimerait sans doute faire du Lynch ou quelque chose qui s’en rapproche (on sent le désir de faire un Eraserhead) mais l’ambiance rappelle davantage l’horrible Pi d’Aronofsky. Mais le film, je le disais, reste anodin, divertissant plus qu’instructif, c’est sans doute pour cela que je l’aime modérément, ou que parfois je prends un pied monstre comme c’est le cas devant Inception, parce qu’à mon avis ce ne sont que des films d’espionnage sans autre vocation que leur pouvoir attractif.
JanosValuska
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le 28 nov. 2014

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