Forrest Gump par abarguillet
Une plume s'envole et atterrit aux pieds de Forrest Gump, un simple d'esprit, assis sur un banc en attendant le bus à Savannah, en Georgie. Esseulé, il va raconter sa vie aux passants qui viendront s'asseoir à ses côtés. Et la sienne est justement à l'image de la plume que l'on aperçoit au début et à la fin du film, qui se laisse porter par le vent tout comme lui-même se laisse porter par ses aventures incroyables dans l'Amérique de la seconde moitié du XXe siècle. Entre son enfance, où il était physiquement handicapé par son dos et le moment même où il raconte son histoire, Forrest Gump sera champion de football américain, soldat au Viêt Nam ( il recevra la Medal of Honor ), champion de ping-pong dans l'équipe militaire américaine, marathonien exceptionnel ( il court sans s'arrêter pendant plus de 3 ans ), capitaine de crevettier, et même milliardaire, malgré lui.
Oui, un récit qui tient de celui du héros ordinaire et de l'éternel Candide, si bien que l'histoire de l'Amérique des années 1950 à 1980 est revisitée par quelqu'un qui se contente de relater les choses sans les juger, d'où un récit bon enfant et simpliste qui évite les écueils et ressemble à un livre d'images un peu trop consensuel à mon goût. Mais il y a Tom Hanks auquel le film doit beaucoup, tant son interprétation est époustouflante de sincérité. Il nous rend sensible un homme ingénu plongé dans son monde, avec sa vision des choses personnelle, si bien qu'on peut se demander si le réel existe bien, si c'est le monde qui passe à côté de lui ou lui à côté du monde ? En quelque sorte, une immersion dans une réalité irréaliste, un décalage si étrange que l'oeuvre vous envoûte et que cet homme naïf nous apparait comme le témoin innocent d'un univers qui ne l'est certes pas. Mais nous, à sa ressemblance, ne sommes-nous pas victimes des événements, soit des éternels bernés, des éternels floués ? N'est-ce pas là le message du film ?