Avant dernier film d'Alfred Hitchcock et considéré par beaucoup comme son dernier grand film, Frenzy c'est aussi le grand retour du réalisateur sur sa terre natale. En choisissant Londres comme théâtre de son dernier thriller, Alfred y retrouve ce ton caustique délicieux de sa période anglaise des années 30. C'est à la fois un film 100% hitchcockien et 100% british, avec une mécanique de thriller implacable et un humour noir réjouissant.


Londres se réveille un matin et ses habitants découvrent un corps flottant inanimé dans l'eau, avec une cravate nouée autour du cou. Ces meurtres qui suivent toujours la même méthode et qui visent toujours des jeunes femmes se répètent dans la capitale anglaise, faisant écho aux meurtres en série de Jack l'Éventreur. C'est alors qu'un homme innocent est accusé à tort, car présent au mauvais moment et au mauvais endroit. Mais c'est du déjà vu mille fois chez Alfred Hitchcock, vous allez me dire ... et vous n'avez pas tort, mais cette fois-ci il aborde le sujet d'une manière légèrement différente que précédemment. Comme auparavant dans Les 39 Marches, La loi du Silence, La cinquième colonne, La Mort aux Trousses ... là encore la recette est la même, mais il y rajoute deux ingrédients cruciaux qui en font toute son originalité. Ces deux ingrédients sont un humour noir et caustique qu'il maitrise parfaitement ici, ainsi qu'une violence graphique à laquelle il ne nous avait pas habitué "me semble-t-il" jusqu'à présent. Malgré son âge avancé, le maitre du suspense arrive encore à nous surprendre.


Frenzy regorge de scène marquantes. La séquence du premier meurtre est une merveille de mise en scène et elle est beaucoup plus rude, plus frontale que dans ses œuvres précédentes. Et puis il y a ce plan merveilleux lors du second meurtre, où la caméra effectue un long travelling arrière pour suggérer ce qu'on sait déjà. Pas besoin de montrer le meurtre cette fois-ci, on sait très bien ce qui c'est passé une fois encore. Les deux meurtres sont donc les deux meilleures séquences du film, mais ce ne sont pas les seuls qui valent le coup d'œil. Toutes les scènes de repas qui montrent avec humour comment le chef de police patauge dans l'affaire, alors que sa femme avait tout deviné depuis le début, est un régal.


Et puis il y a la performance des acteurs, tous vraiment excellents. Jon Finch (le Macbeth de Polanski) est ici le "faux-coupable" et son jeu est vraiment d'une justesse folle. Sa performance en ressort d'autant plus, qu'il est entouré d'une bande d'acteur avec un jeu beaucoup plus théâtral que le sien. Que ce soit Barbara Leigh-Hunt son ex-femme, Bernard Cribbins son patron de bar, la pétillante Anna Massey avec qui il lie une relation amoureuse, Jean Marsh la secrétaire apparemment très rigide (et frigide), Alec McCowen le chef de police flegmatique et sa femme Vivien Merchant très mauvaise cuisinière (j'adore la dynamique entre ces deux là) ... tous arrivent à tirer leur épingle du jeu. Et puis il y a Barry Foster qui joue le meurtrier pervers sexuel et impuissant, sa performance est brillante. Il passe par toutes les émotions, il peut être flamboyant, effrayant ou ridicule. Mais vraiment, c'est l'ensemble du casting qu'il faut applaudir et c'est ce mariage entre jeu plus réaliste et propre au cinéma avec un jeu plus libre et théâtral qui est pour moi l'un des gros point fort du film.


Frenzy profite d'une intrigue parfaitement bien ficelée, sachant allier efficacité, suspense, humour noir et ambiguïté. Simple et efficace, voilà une nouvelle pierre (la dernière ?) à un immense édifice, l'une des plus belle et grandiose carrière de cinéaste du siècle dernier.

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le 19 sept. 2021

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lessthantod

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