Attention je spoile tout le film dans cette critique.
Quel film malin.
J'avais au départ quelques appréhensions sur le film, mon père me l'ayant vendu comme du pur torture porn gratuit, mais certaines critiques et l'envie de me fonder ma propre idée m'ont réchauffé. Et quelle surprise à la fin du film quand j'ai réalisé que je venais tout simplement de l'adorer.
Ça sera froid, précis et implacable. Et ça ne finira pas bien. Vous
voulez essayer ?
Dès l'affiche la couleur est annoncée. Ce qui fait de Funny games un film exceptionnel, c'est sa volonté de proposer une violence atroce sans jamais la montrer, ici tout est suggéré, pas un coup, pas une goutte de sang (enfin si un peu).
Pour reprendre les mots de mon père "On voit la tête d'un petit garçon exploser à coup de fusil.".
Eh bien non. On ne voit rien, on l'entend, mais on ne voit rien. Le film est juste si bien rythmé que mon père a eu le souvenir de l'avoir vu (un peu comme l'effet Se7en, où tout le monde croit avoir vu la tête alors qu'on ne voit que la boîte). Et c'est là où le film est fort, malin, et propose quelque chose d'original.
Ce que j'aime également dans Funny games, c'est que nos personnages principaux n'ont même pas l'air séquestrés, ils sont chez eux, la porte est ouverte, ils ont tellement de moyens de s'en sortir (en plus les voyous partent un bon moment alors c'est pas compliqué non ?). Mais la simple idée que tout cela ne soit qu'un malentendu, un petit excès de folie, fait qu'ils n'ont même pas le projet de tenter quoi que ce soit (du moins au début du film), ils se disent que ce sera sûrement fini bientôt, que tout va redevenir normal, et qu'ils auront simplement eu plus de peur que de mal. Et le film joue là-dessus quand il ne nous avoue même pas à nous, spectateur, le motif de cette torture. Parce qu'ils ont l'air gentil en plus, ils sont attentionnés, polis ; pas du tout des gueules de méchants. Alors peut-être que c'est juste deux malades mentaux qui font ça par plaisir, mais à aucun moment on n'en parle réellement, ce qui enrobe le film d'une couche de mystère anecdotique.
Il faut aussi parler du quatrième mur, c'est très osé tout de même, Paul, le voyou brun, va jusqu'à remonter le temps du film pour réparer une erreur. Comme s'il était plus que le maître de la situation, comme s'il était le maître de sa réalité, omnipotent, intouchable. Cette touche d'humour dans un film pourtant si sérieux fait réfléchir quant à la réalité du propos, est-ce que c'est vrai tout ça ? Ou est-ce juste une volonté de Paul, qui veut assouvir son fantasme de la plus belle des manières.
J'aimerais juste revenir sur la scène de silence, juste après le meurtre de l'enfant, froide, glaciale même, sans un mot, durant une éternité. Notre beau petit couple ne comprend pas ce qu'il se passe, il n'arrive pas à réaliser, il se dit que c'est faux, que c'est inventé, que tout cela n'est qu'une farce de mauvais goût. Mais l'horreur est là, la télévision tourne toujours, teintée de sang. Cette scène est très longue, il ne s'y passe rien, juste le calme après la tempête, mais elle est indispensable et vraiment intelligente.
En bref un film froid, gratuit, puéril, bête et méchant. Mais un film malin qui sort des codes et qui dénonce la gratuité humaine. Parfait.