Mélanie Laurent a déjà tenté l’aventure américaine devant la caméra ; la voici donc aux commandes en tant que réalisatrice, pour un film noir dont les USA ont le secret, avec Nic Pizzolatto à l’écriture originale.


Le récit, sombre et taiseux à souhait, joue sur les plates-bandes d’un Denis Lehane ou T**aylor Sheridan** (à l’écriture de Comancheria qui voyait déjà Ben Foster en proie aux démons de la marge) : crépusculaire, retraçant la trajectoire de personnages en perdition, qui fuient sans destination particulière un passé pesant vers un horizon à peine troué de quelques lumières fugaces.


Le film bénéficie de plusieurs atouts : ses comédiens, dont un Foster massif et intense, et, personne n’en sera surpris, Elle Fanning dont la présence irradie à peu près n’importe quel centimètre de métrage (mode objectif OFF) ; la photo, confiée au français et fidèle de Mélanie Laurent Arnaud Potier, joue parfaitement de l’obscurité, pour quelques tableaux faisant la part belle aux bleus et orange, dans une atmosphère esthétisante sans jamais trop en faire (à l’exception de quelques plans atrocement instagrammés de l’océan) et au diapason d’une virée symboliquement très nocturne.


Le genre se pose donc avec une certaine assurance, même si l’on pressent assez rapidement les automatismes d’écriture : une cavale un peu prétexte qui nous permet de garder sous le coude le retour du croque-mitaine, une maladie incurable pour te fragiliser de l’intérieur un monsieur muscle qui suçote un peu trop le goulot et une jeune fille qui ne dit pas tout pour relancer des enjeux dont on connaissait déjà la teneur…


Résultat : mademoiselle pleure beaucoup et monsieur muscle intériorise. Certaines scènes sortent du lot, comme ces retrouvailles avec son ex-femme qui, assez subtilement, dévoilent aussi les zones d’ombre de celui qu’il ne faut pas trop prendre pour un ange gardien, et un plan séquence d’évasion dont la tension est bien rendue.


( j’ai tout de même du mal à pardonner un sort pareil rendu à Elle Fanning, dont la seule présence dans un film ne peut que contribuer à sauver le monde, mais passons).


Les maladresses qui émaillaient une atmosphère assez bien rendue vont brusquement s’épaissir lors d’un laborieux épilogue, qui prendra soin, après une ellipse de 20 ans de bien expliciter ce qui avait déjà été dit, et de nous arroser le tout de larmes mêlées à un ouragan rédempteur. Et le mélo de prendre des proportions météorologiques…Franchement, qui en demanderait tant ?


(5.5/10)

Sergent_Pepper
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le 18 janv. 2019

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Sergent_Pepper

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