Quelle ménagerie cette famille ! Comme toutes les familles vous me direz, familles dans lesquelles s'échangent coups de griffe, câlins appuyés, férocité certaine, regards courroucés, attachement viscéral, sauvagerie intime.
Tout y passe !
Pour affronter tout ça, Gaspard a besoin d'un alibi, ou plutôt d'une compagne de route Et il va la trouver en la personne de Laura, sur le rail.
Laura va être confrontée très vite à la dureté du monde animal et de cette famille étrange. Une plongée dans le grand bain pour le moins saisissante. ça tombe bien, Laura est une fille très adaptable, un peu aventurière, pleine de fantaisie et qui n'a peur de rien (ou presque).
Il se trouve que moi aussi j'ai grandi tout près d'un zoo, celui de Saint-Vrain dans L’Essonne, qui a connu son heure de gloire (de nombreuses classes de l’île de France s'en souviennent, lors des sorties scolaires) mais qui a du fermer lui aussi pour des raisons financières.
Derrière le mur de la ferme, dont nous occupions une aile, grondaient les lions et on voyait la tête des girafes dépasser des clôtures. Quand les amis ou la famille venaient nous rendre visite, la promenade dominicale consistait souvent en la visite du zoo, dont une partie s'effectuait en voiture (c'était précurseur pour l'époque).
Je me souviens très bien que mon oncle a failli se faire étranger par un éléphant qui s'était entiché de lui et avait passé sa trompe par la fenêtre de la voiture. Impossible de se dégager ! Quelle frousse ! Mais c'est resté dans la légende familiale !
Ce film m'a donc tout naturellement replongé dans cette époque agréable de mon enfance.
D'enfance on en parle aussi beaucoup dans ce film et les moments en forme de vieilles vidéos du passé resurgissent dans le discours, avec une mère fantôme éclatante de vitalité, éblouissante et câline, dont la disparition brutale (due à la sauvagerie animale) a laissé un gouffre béant dans le cœur de tous les membres de cette famille.
La sœur cadette en est restée visiblement traumatisée, se cachant sous sa pelure de louve, refusant de grandir.
Le frère aîné peine à décoller, envahi par la culpabilité et le devoir de continuer à faire tourner le zoo en faillite, malgré toutes les difficultés.
Le père assez fantasque, s'est perdu dans les relations multiples. Il a du mal à concrétiser sa vie.
Gaspard a fui, lui le fils préféré, qui de ses aveux a été le plus "chouchouté" mais qui a eu envie de s’épanouir ailleurs, tant sans doute il trouvait le climat familial pesant.
Voici des êtres nostalgiques d'un passé qui n'est plus, d'une famille unie, d'un zoo qui tournait, mais qui ont du mal à voir la vérité en face mais qui, par la force des choses, vont devoir s'y confronter.
J'ai trouvé des thèmes intéressants dans ce film : la fratrie, le deuil, l'amour, l'inceste, la jalousie, devenir adulte, s'engager.
Je déplore cependant que certains thèmes soient juste survolés comme celui du fils préféré, de la jalousie entre frères et sœurs, de la fraternité.
Sans doute qu'il y en avait trop et que le réalisateur n'a pas su trancher, mêlant tout ça dans un fourre-tout, avec quelques moments de génie, comme la rencontre entre Gaspard et Laura, les inventions de Gaspard enfant, la scène de la battue des chiens.
Mon avis est qu'il s'agit d'un film de jeunesse et qu'il aurait mérité d'être plus creusé mais c'est un cinéma prometteur, plein d'imaginaire et de pépites.
La direction d'acteurs est en tout cas réussie au vu des performances de Félix Moati, Laeticia Dosch et Christa Théret (étonnante).