On avait laissé Antony Cordier au doux souvenir de deux long-métrages plutôt sympathiques (« Douches froides » et « Happy Few »), il y a respectivement douze et sept ans. Autant dire que le monsieur tourne peu. Le revoilà avec une œuvre tout aussi admirable et peut-être sa plus réussie par son côté iconoclaste et évanescent. On se dit durant la projection que son nouveau film puise son inspiration un peu partout, de Michel Gondry et Jean-Pierre Jeunet pour le côté bricolage à Wes Anderson pour sa présentation d’une famille pas comme les autres. Mais on finit par admettre que « Gaspard va au mariage » compose sa propre mélodie et affiche une singularité qui n’appartient qu’à lui. Un film charmant et charmeur dont tous les personnages sont quelque peu décalés mais pas trop non plus évitant ainsi les ornières parfois dangereuses et risquées de l’onirisme ou du burlesque.
Durant tout le film, la tonalité jongle entre humour et gravité réussissant souvent dans les deux domaines même si parfois les ruptures entre les deux se font maladroitement. Il y a bon nombre de scènes caustiques découlant principalement du décalage vécu par le personnage grâce auquel on découvre cette famille dysfonctionnelle, celui de Laetita Dosch. Révélée récemment dans « Jeune femme », elle infuse grâce à sa personnalité hors normes les moments et les dialogues les plus drôles du film. Si elle incarne ici l’un des nouveaux visages du cinéma français, elle est secondée par un casting épatant, intelligent et très homogène de jeunes espoirs du cinéma français composé de Félix Moati, Christa Théret et Guillaume Gouix. Marina Foïs, dans un second rôle plus discret, représente quant à elle un versant plus âgé du septième art hexagonal. « Gaspard va au mariage » sait aussi se montrer plus doux et mélancolique, notamment lors de délicieux flashbacks au grain d’époque adapté ou lors de moments de grâce distillés par intermittence qui laissaient espérer un film encore plus réussi.
Malheureusement, si on prend plaisir à suivre ces retrouvailles familiales situées dans un zoo (ce qui accentue l’aspect original du film), il souffre d’imperfections freinant parfois notre enthousiasme. On pense notamment à des défauts d’écriture. Une fois le postulat de base posé, Cordier peine à renouveler les enjeux dramatiques et les situations de son film. C’est peut-être la raison pour laquelle on a l’impression que tout cela s’étire un peu en longueur et que les scènes s’enchaînent parfois maladroitement. Le découpage en chapitres apparaissant quant à lui totalement inutile. Mais force est de constater que le côté insolite de cette œuvre pleine de fraîcheur à la photographie travaillée emporte le morceau et nous rend indulgents. On passe un excellent moment avec cette troupe un peu barrée qui nous fait du bien et véhicule de belles valeurs. On ne rit pas aux éclats, pas plus qu’on ne pleure pas à chaudes larmes, mais de certains plans magnifiques à quelques situations incongrues en passant par des dialogues bien écrits, on ressort de cette bulle de cinéma hors des sentiers battus conquis.
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