Gloubi-boulga l'épileptique
Je savais que le film était en 3D (ce qui sonne rarement comme "film d'auteur"). Je savais qu'il contenait du Jay-Z, des stars et de l'esbroufe. Je m'attendais donc à un gentil nanar US pas prise de tête, un peu plan-plan mais joli et divertissant...
Rien ne me préparait à quelque chose d'aussi révoltant.
Du début à la fin, ce Gatsby n'est qu'une immense coquille vide étalant ses artifices grossiers à la face du spectateur sans discontinuer, en espérant qu'il n'y verra que du feu. Le film suit une cadence infernale qui le rend insupportable à regarder: tout va trop vite, tout le temps. Les discussions vont trop vite, les mouvements sont trop brusques, les véhicules ne semblent qu'accélérer en permanence, comme si l'image était bloquée en avance rapide. Pourquoi pas après tout: un film comme The Social Network - chef d'oeuvre de fluidité, avançant au pas de course - a pu montrer que l'on pouvait faire du cinéma en "haut débit", que la vitesse pouvait créer quelque chose de beau, de cohérent.
Sauf qu'ici le montage est absolument dégueulasse. On change de plan toutes les deux secondes, la plupart du temps sans raison, juste pour le plaisir de couper; les ellipses se suivent par rafales, le rythme des champ-contrechamp fait penser à un match de ping-pong, les images se superposent sans arrêt, à tel point que le son n'arrive pas à suivre. Les 20 premières minutes sont un vrai supplice à cet égard: 20 minutes qui ressemblent à s'y méprendre à une bande-annonce et durant lesquelles on prie que le film freine au moins un peu. Il se calme en effet légèrement (et je ne parle pas des quelques ralentis parfaitement hors de propos), mais continue à ressembler à un immense clip décadent de deux heures...
Si seulement il n'y avait que cela. Mais non: le pire, c'est l'esthétique globale du film. On sent que l'ami Baz cherche à montrer le côté profondément superficiel du monde dans lequel Gatsby et ses ouailles évoluent: seulement le résultat final exsude d'un mauvais goût sans complexes, et témoigne surtout de la médiocrité constante des effets visuels. C'est gorgé d'images de synthèse au point de ressembler à un film d'animation mais justement: ça se voit. L'intégration réel-virtuel est tellement grossière qu'on se croirait devant une production du début des années 2000, les scènes en voiture font penser à OSS 117 (dans lequel les effets spéciaux avaient un cachet volontairement vieillot), et sur d'innombrables scènes on a l'impression qu'il suffirait de tendre le bras pour toucher le fond vert. Voir évoluer Di Caprio devant un ciel plus faux que dans une vidéo du premier Youtuber venu, ça la fout un peu mal quand même.
Pour en rajouter, les couleurs sont criardes, les maquillages assez vilains, tout ressemble à du plastique, et le plus grave, c'est que ça a l'air parfaitement assumé.