Petit conseil : si vous voulez voir Gemini Man, assurez-vous que le cinéma près de chez vous le passe dans les meilleures conditions. Si le cinéaste Ang Lee s'est démené pour le tourner à 120 images/seconde (à l'instar de son très beau Un jour dans la vie de Billy Lynn), ce n'est plus pour la beauté de l'essai. Non, cette fois c'est une note d'intention. Et elle dit : le futur du cinéma, c'est par là qu'il passera.
Gemini Man, certains pourraient statuer qu'il s'agit d'un magasin de jouets laissé clé en main à Ang Lee. Soit. Mais la différence, c'est que le réalisateur Taïwannais est bien plus proche d'un Alfonso Cuarón ou d'un James Cameron que d'un Michael Bay par exemple. Par conséquent, ses joujoux il en prend soin.
Même pour un film comme Gemini Man qui ne réinvente rien, Ang Lee décide de lui apporter une épaisseur insoupçonnée de prime abord.
À l'heure ou les procédés de type De-Aging (consistant à rajeunir les acteurs) se multiplient, on peut voir le long-métrage comme la réflexion inquiète de voir une technologie de pointe utilisée à des fins illusoires (de type vaincre le temps ou la mort) ou carrément douteuses (réutiliser un acteur disparu).
En creux de ce combat opposant Will Smith (impeccable) à son double de 25 ans, c'est aussi l'avertissement d'un visionnaire à l'égard de l'opportunisme rance qui menace le blockbuster moderne.
Tout cela est bien sûr reste bien sûr au second-plan, l'essentiel demeure un film d'action tout ce qu'il y a de plus basique sur les dérives du clonage. Le script n'offre ni renouvellement thématique ni réelle profondeur (la saga vidéoludique Metal Gear Solid reste imprenable).
Mais avoir un metteur en scène aussi virtuose que Ang Lee, c'est l'avantage que bon nombre de gros budgets n'ont pas. Et ce n'est pas la première fois que ledit cinéaste transcende la commande (j'aime Hulk et j'assume).
Alors encore une fois, le déplacement en vaut surtout la chandelle pour lui. Les caméras utilisées (avec un nombre d'images près de 6 fois plus élevé que l'habituel ratio 24/seconde) décuple l'intensité et la fluidité du mouvement. Conscient de son potentiel cinématographique, Ang Lee multiplie donc les procédés pour l'expérimenter à fond. Caméras embarquées, vues subjectives ou thermiques. À travers la poussière, le feu ou sous l'eau.
Le résultat? Un sentiment d'immersion presque jamais vu dans une salle de cinéma, à en agripper son siège tant la tension en devient presque organique. J'aurais évidemment préféré qu'une telle technologie soit au service d'un film plus intéressant sur le fond. Mais pour une fois que je peux regarder l'avenir avec plaisir (et sans appréhension), Gemini Man mérite le respect.

ConFuCkamuS
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le 2 oct. 2019

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