Géographie humaine
6.5
Géographie humaine

Documentaire de Claire Simon ()

Pendant documentaire de Gare du Nord, fiction sortie concomitamment et moyennement réussie, Géographie humaine se propose de nous faire rencontrer la population qui se presse quotidiennement dans cette énorme gare (la plus grande d'Europe apparemment ?), et celle qui y travaille. Avec un parti pris assez net, mettre en valeur son caractère cosmopolite. Nous verrons ainsi défiler des Algériens, un Malien, un Congolais, des Belges, des Américains, une Cubaine, un Vietnamien, etc. C'est Simon Mérabet, ami de la réalisatrice d'origine algérienne (ce n'est pas anodin en cela que ces rencontres vont faire écho à son propre parcours), qui part à la rencontre de cette foule bigarrée, souvent sympathique.


Pour les voyageurs, l'idée est d'entendre la parole de ces gens "juste avant qu'ils ne montent dans leur train". Pour les permanents, ceux qui y travaillent, il s'agit davantage de comprendre ce qui les a amenés là, et de cerner leurs conditions de travail, leurs projets.


On retrouve avec un certain plaisir des zones de la gare vues dans Gare du Nord : les toilettes, les escaliers mécaniques, le traiteur vietnamien, la boutique de sous-vêtements. Certains témoignages sont étonnants :
- les deux ados de 15 et 16 ans - qui en paraissent 5 de plus - qui expliquent comment elles se font brancher constamment ;
- le pendant de cette scène, un groupe de jeunes gars qui viennent ici "pour baiser" ;
- un grand Noir, agent de la Sncf, qui décrit la douceur des Blanches par rapport aux Noires qui sont plus... gnnnnn
- la femme des toilettes racontant comment un homme s'est fait écraser par un train en voulant récupérer sont chien sur les voies ;
- un Algérien fraichement converti au catholicisme racontant l'ambiance de Lourdes ;
- un couple mixte, l'homme noir expliquant qu'il doit obtenir l'autorisation des "ancêtres" pour mourir ;
- bon nombre de gens qui nous disent être ici par nécessité, au premier rang desquels l'ultime témoignage d'un Congolais, Auguste : bardé de diplôme de haut niveau, fréquentant avant le coup d'Etat des "marxistes" les ministres de son pays, il se retrouve agent de sécurité ici, sur le conseil (judicieux, précise-t-il) d'un employé de Pôle Emploi ; un témoignage saisissant sur l'égalité des chances en France.


Malgré tous ces points positifs, j'ai parfois piqué du nez, je l'avoue. La faute à d'autres moments guère passionnants : Simon qui énumère les pays où il a voyagé (on s'en fout, non ?), un SDF mutique longuement interviewé en anglais, une femme qui accompagne une centenaire, la dame des toilettes un peu longuement interrogée...


Autre point faible : la qualité des images. Très peu de beaux plans, et des choix de cadrage souvent assez laids.


Mais le film gagne à la décantation, je pousse donc jusqu'à 7.


Côté musique, là, rien à dire : une seule musique, Miles Davis dans "Filles de Kilimandjaro". Elle repose du jingle de la SNCF, qui finit par être assez insupportable au bout d'1h40. Et est plus à mon goût que les accords de guitare électrique qui ponctuaient Gare du Nord.

Jduvi
7
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le 15 oct. 2018

Critique lue 206 fois

Jduvi

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