Dégage —

Filmé et écrit comme un bon épisode des Contes de la crypte, GET OUT est ce film tellement explicite qu'il en perd tout le charme allégorique et poétique de l'exercice de style des bons films de série B
À croire qu'il fallait bien du stabylo fluo pour que les critiques comprennent entre les lignes la parabole raciste, et que seul un petit film de genre sans portée politique soit tolérable, pour ce pays qui digère encore son passé ségrégationiste récent. Plus clivée que jamais par le jeu des communautarismes, l'amérique de Trump reste stupéfaite et épuisée, un peu plus désemparée jour après tweet, et les rares contestataires qui tentent d'éteindre les incendies allumés par le pyromane de twitter, interdisant la moindre mise en perspective de l'histoire récente, ne peuvent que l'admirer diviser pour mieux régner avec un succès fou (litteralement s'entend)

Un film inoffensif qui a été soigneusement survendu par les médias de la classe dominante pour faire une diversion bien convenable d'avec le film dynamite de Katheryn Bigelow, Détroit. Evitant ainsi habilement de relancer un débat national sur les violences policières aux États-Unis, pratique. Honte aux critiques américains.

Cette année, la meilleure charge anti-raciste s'appelait 'Juneteenth', épisode brillantissime de la série de Donald Glover, ATLANTA (s1ep9). Lors d'un event 'social networking party' chez de grands bourgeois méprisant, Donald se prend le plafond de verre en pleine chute ascensionnelle vers l'élévation sociale, mais réagit avec la classe d'un Buster Keaton afro, en apnée dans une marée de connerie mais lucide. Hyper justement observée, chaque situation hallucinante est révélatrice de contradictions hypocrites du discours politiquement correct: il en profite pour déconstruire l'appropriation culturelle systémique du capitalisme par là (un blanc fan de 'mother Africa'), la violence symbolique invisible et normative des puissants par ci (s'adapter / perdre sa dignité?)... bref, là où GET OUT restait muet, il n'hésite pas à prendre de la hauteur et à dire aussi de façon crue comment fonctionne la discrimination, cette perpétuelle stratégie de classe consanguine. Avec ces vingt petites minutes, il touillait vingt fois plus la merde avec ses petites barres de rires plutôt génantes. Friandises.

"-What do you do?
-Nothing.
- ...???......ha....haha..hahahahihihi (rires de cagoles embourgeoisées)
-No I mean it. Nothing."
-_-

https://www.youtube.com/watch?v=tLvRyBxebPc <3