Non vous n’aurez pas sa liberté de penser !

Hollywood, en proie à une grosse panne d’inspiration depuis quelques années, sortant une succession de remake et autres reboot souillant les œuvres originales, jette cette fois son dévolu sur l’univers des dessins animés Japonais. Cette années, le cinéma américain s’attaque à Ghost in the shell, série de mangas et animés crée par Masamune Shirow. L’évènement cinématographique le plus attendu de ce début de printemps est enfin arrivé.


Réussir à garder son humanité dans un monde ultraconnecté


On avait déjà eu un bref aperçu dans Pacific Rim avec du Mecha bien Japonais. Là, cette ingénieuse et délicieuse idée prend de l’ampleur : le mélange casting américain/japonais et ambiance 100% Japonaise. Dans Ghost in the shell, c’est encore plus poussé. Du manga papier au manga animé, Ghost in the shell est respecté dans cette version live. Le choix habile de la palette des couleurs, les costumes futuristes/cyberpunk, le design des accessoires, les véhicules (motos, voitures, jusqu’aux camions poubelles), la technologie, les hologrammes omniprésents dans cette mégapole sombre mais colorée, les robots (dont les célèbres et cauchemardesques Geishas bots), les décors asia-futuristes, une parfaite retranscription d’un manga, dans la vie « réelle ».


Les férus de science fiction ne seront pas mis de coté, on pense à eux puisque Rupert Sanders a prit le meilleur, c’est inspiré des grands films du genre. Décors extérieurs, décors intérieurs, ruelles, on retrouve ni plus ni moins qu’une sorte de revisite de Blade Runner, Terminator, Matrix et Le cinquième élément. Malheureusement, coté richesse, Ghost in the shell est très loin de les égaler. Qu’importe, c’est tellement rare d’avoir un film de science fiction de ce potentiel qu’il est tout excusé. Esthétiquement, c’est une merveille, ça fait monter les larmes aux yeux et ça va même au delà de ce que la bande annonce nous montrait. Qu’en est-il du reste ?


NON ce n’est pas une version 2.0 de Lucy


Vous allez la voir sur tous les plans, sur toutes les coutures, elle porte une combinaison moulante dévoilant ses formes avantageuses qui feront baver presque tous les hommes qui se battraient pour gagner son cœur : Scarlett Johansson a été choisie pour interpréter le Major. Choix décrié par certains fans étant donné qu’il est normalement asiatique. Qu’importe, même si l’actrice manque d’expressivité, elle est convaincante, elle colle parfaitement au personnage et va même au-delà : elle est presque attachante (et pourtant, je ne peux pas l’encadrer). Plus humaine que son homologue animé, elle a cette petite mélancolie/fragilité qu’on peut lire dans son regard qui fait qu’on s’y attache.


Personnage solitaire, la première de son espèce, une arme redoutable pour contrer les cybers terroristes grâce à ses facultés physiques et son intelligence, notre héroïne en proie à des sortes de bugs (glitches) informatiques faisant remonter à la surface ces souvenirs d’humaine, s’interrogera sur sa propre humanité, se rebellera contre ceux qui l’ont crée (et deviendra donc une ennemie à abattre ou à rebooter), et recherchera son passé. Un passé tragique. C’est grâce à son « ghost », autrement dit : son âme humaine, qui se réveillera dans son corps robotique qu’elle sera guidée dans son investigation. Un des points forts du film et ce, malgré le fait qu’il manque d’étoffement. On est à des années lumière de l’interprétation de Johansson dans le mauvais et surestimé Lucy. J’ai beaucoup apprécié ces interactions avec sa créatrice/mère de substitution interprétée par la ravissante Juliette Binoche. Marion Cottillard devrait beaucoup apprendre d’elle.


Quand l’efficacité manque de profondeur et de rythme


Le sujet qui fâche : les défauts. Et le film, bien qu’il fasse preuve de beaucoup d’efforts, de modestie et d’audace, n’en est pas exempt et c’est ce qui lui porte malheureusement préjudice. Si vous avez déjà vu l’animé, cette version ne sert à rien. Elle est trop pauvre dans son contenu malgré un graphique sublime. On peut déjà reprocher une chose : ce manque de profondeur dans l’histoire ET les personnages. Hormis Le major, tous les autres personnages sont peu mis en avant, faisant presque de la figuration.


Et c’est dommage, surtout quand on voit le potentiel du personnage de Batou (reproduction très fidèle du personnage même s’il est moins massif et que la vf n’est pas celle de Daniel Beretta), tout de cool attitude. Grosse déception du coté d’un des membres du casting, et pas des moindres puisqu’il s’agit de Takeshi Kitano (Battle Royale, Zatoichi) qui officie en tant que Daisuke Aramaki, chef de la section 9. L’acteur s’ennuie à mourir, et ça se voit. Pas impliqué, dialecte, mimiques d’une lenteur sans nom. Ce n’est guère mieux pour les autres personnages secondaires, tous sous exploités (le terroriste sombre et torturé Kuze interprété par Michael Pitt, Togusa, le seul humain du groupe de la section 9, interprété par Chien Han, et j’en passe).


Autre point qui fâche : le manque de rythme. Le manga avait beau être parfois mou, les réflexions posées dans son intrigue donnaient tout son intérêt. Pour la version live, c’est différent, on ne « vibre » pas autant et surtout : on n’a pas vraiment peur pour la vie de notre héroïne désorientée. Si les scientifiques ont réussis à transplanter son cerveau dans un robot, rien ne les empêchent de recommencer. Le début est captivant mais arrivé au milieu du film, c’est la panne. C’est long et endormissant, on est à deux doigts de perdre le fil de l’histoire. C’est heureusement arrivé à la dernière demie heure que Ghost in the shell se montre sous son meilleur jour.


Et si l’intelligence artificielle accédait à la conscience ?


Pour la bande originale signée Clint Mansell (Requiem for a dream, Black Swan ), c’est à pleurer. Rien que la musique accompagnant la bouleversante scène d’introduction vaut tout l’or du monde. Des frissons. Le synthétiseur, y a que ça de vrai. Ca et l’esthétisme c’est les perles du film. A noter que le thème musical du manga et ce charmant chœur envoutant, est bien de retour mais…à la fin.


Les enjeux philosophiques et technologiques avec cette technologie continuant de plus en plus à déshumaniser les êtres humains, ne seront pas mis de coté bien qu’on aurait aimé les voir plus travaillés. Ghost in the shell se pose pas mal de questions existentielles. Le charme de la franchise. « Où se situe la frontière entre le corps et l’esprit ? », « Qu’est ce que l’âme ? », « Qu’est ce qui fait qu’on se sent humain ? », « Qu’est-ce qui distingue l’être humain d’un robot ayant conscience de son existence ? ».


Celles et ceux qui ont fait un peu de philo ne pourront s’empêcher d’y retrouver une philosophie très Cartésienne (l’esprit est une substance distincte du corps, une substance dont l’essence est la pensée « source wikipédia ») qui donne à réfléchir. Il est vrai que le thème a déjà été abordé un peu plus profondément et moultes fois dans d’autres œuvres de science fiction. C’est néanmoins toujours bon d’avoir une piqure de rappel, de nous rappeler à quel point la vie humaine est meilleure que la vie artificielle si elle devait être amenée (et elle le sera un jour) à exister.


Au final, Ghost in the shell plaira à ceux qui ne connaissent l’œuvre que de nom, mais laissera dubitatif les inconditionnels. Pas beaucoup d’action (et elles ne sont pas très énergiques), durée trop courte, univers sous exploité, scénario simplifié, mais magnifiques musiques, prises de vues, décors, costumes, petits moments d’émotions, répliques philosophiques savoureuses, respect du manga original (tout du moins sur les plans mythiques et quelques clins d’œil divers) et jolie implication des acteurs avec en tête une Scarlett Johansson loin de faire sa starlette ainsi qu’un Pilou Asbæk en Batou aussi attachant que son homologue animé. Restera ce léger sentiment de vide faisant qu’on suit l’histoire sans vraiment rentrer dedans. On s’attendait à mieux, on a néanmoins déjà vu bien pire au royaume des adaptations live de manga…Dragon Ball évolutiooooonnn.

Jay77
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le 30 mars 2017

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Jay77

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