Alors, que vaut cette version live du célèbre animé de Mamuro Oshii ? En l'état, et si l’on fait totalement abstraction du manga, le film n'est pas mal du tout et s'avère même être un blockbuster plutôt au-dessus de la moyenne. Mais comme la Belle et la Bête récemment, la raison en revient principalement à l'incroyable qualité du matériel de base. Tout ce qui est intéressant et puissant dans le film était déjà présent dans la version de base. Par contre, contrairement à la nouvelle version du classique de Disney, je trouve que l'écart de qualité entre la version live et animé est plus important. Ce n'est pas forcément dû à un grand changement entre les deux films, la version de Rupert Sanders suivant la trame de celle de Oshii quasiment à la lettre, mais plutôt dans le traitement des thématiques. Nous avons ici à faire à un blockbuster beaucoup plus classique et moins profond et qui par conséquent n'arrive pas à la cheville de l'original.
 
La version de 1995 (22 ans déjà, c'est dingue comme ce film a bien vieilli) était un film très contemplatif et lent. Bien entendu, il comportait quelques scènes d'actions (reprises quasiment tels quels ici) mais l'intérêt du film reposait surtout sur un propos philosophique : qu'est-ce qui fait de nous des êtres humains ? Tout le récit tournait autour de cette unique question et l'intrigue était finalement plus un prétexte que le véritable moteur. Un peu comme Blade Runner avant lui, le Ghost in The Shell original se révélait être un passionnant cours de métaphysique sur lequel on avait greffé une intrigue de thriller pour le rendre plus accessible. Ici, blockbuster américain oblige, c'est exactement le contraire. L'intrigue policière prend clairement le pas sur le côté « conte existentiel » et le propos n'a plus grand chose de passionnant. On ne s'intéresse plus à ce qu'est l'humain de manière générale mais uniquement au cas du major. Nous sommes plus devant une sorte de version moderne de Robocop (excellent film au demeurant) que devant le propos plus que jamais d'actualité que développait Oshii.
 
Le cas du Major est d'ailleurs un des gros soucis du film ; si Scarlett Johanson n'est pas mauvaise et qu'elle fait le « taf », le traitement du personnage est assez dérangeant. À l'origine, nous avions un personnage assez introverti et très décalé par rapport aux héroïnes classiques. À tel point que l'identification du spectateur se portait plus sur le personnage de Batou, qui était un peu notre point de regard sur l'univers. Ici, on est face à une héroïne beaucoup plus classique dont les troubles identitaire ne semblent pas voler beaucoup plus haut que ceux d'une gamine de 15 ans... C'est un peu dommage car en respectant l'original sur la forme mais pas forcément sur le fond, on se retrouve devant un film un peu bancal. Les amateurs d'action risquant de le trouver un peu mal rythmé et les amateurs de scénarios le trouveront simplistes...
 
Maintenant voilà, le principal souci du film de Sanders est d'arriver après celui de Oshii et d'être très clairement inférieur car pris en dehors de ce contexte, c'est plutôt un bon métrage. Le travail visuel est à tomber, l’orchestration sur la musique est plutôt intéressante (alors que pourtant l'original était un must à ce niveau) et on a à faire à un blockbuster bien plus travaillé et courageux qu'à l'accoutumée. Même s'il a fortement amoindri son propos, Sanders a gardé l'essence du film original et n'a pas pris le parti de faire un simple blockbuster d'action lambda. Je conseillerais donc le film aux amateurs de grosses productions, par contre, si vous êtes amateurs de science-fiction, procurez-vous l'original qui reste quand même un des plus grands classiques du genre.
 
En deux mots :
 
Ghost in the Shell est un blockbuster plutôt réussi et au-dessus de la moyenne. Malheureusement, il souffre inévitablement de la comparaison avec l'original de Mamuro Oshii dont le sujet était bien plus profond et intéressant. Assez bon dans l'ensemble, le film risque d'avoir du mal à trouver son public car il est frustrant aussi bien pour l'amateur d'action que pour le spectateur en quête de philosophie...

Laubergiste
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le 8 avr. 2017

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