Après « Blanche-Neige et le Chasseur », Rupert Sanders entame une seconde adaptation au cœur d’un système Hollywoodien. L’œuvre est malheureusement victime de son succès, car le manga a suscité bien des réflexions sur un avenir dicté par notre propre technologie. Mais la version de 1995 est bien loin derrière et le temps a rattrapé ce concept à travers diverses œuvres bien abouties. La thématique de nature humaine au détriment de la machine peut être d’ores et déjà considérée comme acquise.
On sent rapidement qu’un hommage est à l’œuvre dès l’ouverture, que ce soit dans l’accord musical ou bien la transcription d’une introduction percutante. D’autres scènes clés font également leur standing sous un rythme bien prononcé. Malgré tout, le projet tend à explorer les détails que le manga laisse en suspens. Il vient combler les trous avec une narration très, voire trop lourde à digérer. Et il est bien là le problème principal. Loin de la finesse de Mamoru Oshii, cette reprise ne convoite pas « l’âme » de l’intrigue. Il s’agit bien d’une recette connue chez Hollywood, : simplifier pour tout public. Or, les circonstances ne s’y prêtes pas vraiment. On attend du film qu’il nous questionne, avant qu’il le fasse sur lui-même. Et nous avons droit à un double jeu qui détaille explicitement chaque décision. Ce côté très dérangeant n’encourage l’audace de nous resservir une œuvre si complexe à la base.
On en vient au Major (Scarlett Johansson), victime de la première heure de puriste hardcore de la saga. L’ethnie est au centre d’un débat qui raisonne comme White Washing. Ceci ne pose pourtant pas de problème et ne mérite pas suffisamment notre attention pour s’attarder sur la trame principale. Dans l’ensemble, les acteurs sont de qualité et leurs personnages sont en adéquations avec le matériau d’origine. Le Major reflète bien le cyborg troublé par son existence et remet bien en question les tendances humaines à dépendre de sa technologie. L’humain est présenté comme fragile et instable et on arrive tout de même à ne pas suffisamment développer le sujet en profondeur. Le sujet est mis de côté, proposant une autre analyse.
Tout ce qui touche au passé du Major est d’une gratuité affligeante. Non pas que ce ne soit pas intéressant, bien au contraire, il est nécessaire de faire le lien. Cependant, la démarche vient de nouveau troubler le bon déroulé de la réflexion. La direction qu’elle emprunte n’est pas pertinente et se faire babysitter tout le long n’aide pas non plus. On questionne sur une nouvelle génération de machine pouvant projeter l’homme à son « immortalité », mais dès lors que le film campe dans la trame du manga, il ne parvient pas à exprimer son idée. Il se retrouve bloqué par son hommage, mal négocié et parfois vide de sens. L’esthétique aura au moins gagné notre admiration, malgré un certain abus. La composition permet d’entretenir un univers futuriste, sombré dans la déchéance. Quant à la bande-son visiblement moins présente, elle ne franchit pas l’illusion que l’on tend à crée.
Un autre exemple irritant revient à la personnification à tout va. En effet, les enjeux d’une société visant à l’extinction de conscience humaine ne nous parviennent pas tel qu’on l’aurait souhaité. L’abstrait est effectivement personnifié au nom de personnages peu charismatique. Ce constat est principalement assimilé aux méchants de l’intrigue. Ils révèlent également être peu cohérents avec leurs intentions et cela rend confus la lecture du concept du transhumanisme.
Malgré l’effort, ce « Ghost In The Shell » a tenté de réinventé son écriture mais peine à tenir debout. Il ne constitue que la coquille, dénuée de son Ghost (Âme) que Sanders n’a pas réussi à retransposer et c’est bien dommage.