Adam Wingard semble faire partie de ceux qui nagent à contretemps des codes qui les préoccupent. Sa fascination pour le remake déguisé et redéguisé n’en fait pas forcément le meilleur candidat afin d’alimenter le Kaiju-Eiga, remade in Hollywood, bien qu’il s’en tire avec les honneurs sur le plan du divertissement pur CGI. La promesse de retrouver les vraies stars du show les réunit sur le même plateau, le même champ et doc le même ring, où l’humanité est placée sur le banc des supporters et de leur propre bêtise, comme souvent. Les faux-semblants s’empilent donc avec un regard éteint de personnages secondaires, qui n’apportent pas plus d’intérêt à une intrigue décousue que de l’humour bien gras et comme nous le redoutions si fortement. Le film ne se cachera donc ni dans la sobriété ni dans la subtilité, pourvu que nous nous accrochions autant que l’on pourra aux vertiges d’un affrontement titanesque.


C’est au lézard d’engager, pour finalement couper le cordon avec ce que l’on avait préétabli en seulement deux volets. Sa rage n’est en rien une caractérisation d’un retour nucléaire ou de pollution, il se mord simplement la queue après avoir piétiné ce qu’il devait défendre. Si ce constat ne tient déjà plus la route au bout de quelques minutes, c’est sans doute le signal de détresse qui nous pousse à remettre l’incohérence sur le devant de la scène. Mais cette fable ironique ne trouvera jamais assez d’épaisseur pour y cacher la misère scénaristique, qui prend pourtant le temps de nous présenter une simple équation. L’humanité reste globalement l’ennemi de la nature. Mais sur le terrain glissant du symbolisme et des maladroites inspirations à Jules Verne, l’intrigue nous épuise à coup de protagonistes dispensables et de théories du complot que l’on ne prend jamais au sérieux. Nous l’aurons rapidement compris, ce ne sera pas dans le dialogue qu’on gagnera en pertinence ou d’efficacité. Entre la parodie et la cinématique d’action, il sera difficile de tout justifier et encore plus de tout épargner.


C’est à présent au gorille de déterrer la hache de guerre. Mais il ne sera pas question d’uniquement en extirper sa masse pour la jeter sur l’autre bout de viande numérique. Il existera quelques moments de flottement entre la créature et une jeune fille muette. Un peu d’humanité trouvera de l’écho dans les quelques minutes qui serviront avant tout de base, afin de peaufiner un rapport d’échelle qui manque de nous faire frémir. À force de changer de point de vue, la taille ne compte plus. Il ne s’agit que d’une démonstration de force, celle d’une boîte d’effets visuels, soulignant une finition admirable de ses merveilleux catcheurs des profondeurs. Mais au-delà de cette vision du corps-à-corps, qui en ferait rêver plus d’un, les gros plans ne baignent pas dans la meilleure mise en scène et c’est le spectateur qui finit par se prendre un coup par mégarde. Le choc n’est pas à la hauteur des espérances, quand bien même il tente de se rapprocher d’un certain del Toro.


« Godzilla vs Kong » est à apprécier sur le plus grand écran possible, sans pour autant s’étouffer de confiserie à en juger ses performances visuelles, globalement satisfaisantes et c’est là qu’est le problème. Là où la franchise jouit d’une démesure décomplexée et parfois raffinée, en pensant au reboot de Gareth Edwards, on se perd dans un déluge de CGI, où l’on prend soin de brosser la fourrure ou les écailles, au lieu de nous immerger dans son univers. Trop premier degré, pas assez nanardesque et sans une once de recul, la rencontre au sommet nous fait repartir boiteux, à l’image des deux alphas qui ont tout donné afin d’exister le plus longtemps possible.

Cinememories
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le 6 mai 2021

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