Dans la droite lignée des comédies horrifiques qui ont vu le jour à la suite du succès de "Shaun of the Dead", "Grabbers" fait partie de celles qui n'ont pas à trop à rougir de la comparaison et pourrait même être considérée comme la petite cousine SF irlandaise du film cultissime d'Edgar Wright.
Des mystérieuses créatures tentaculaires envahissent un petit village portuaire irlandais. Un seul moyen pour les vaincre : leur allergie mortelle à l'alcool. Autant dire qu'en ayant choisi pour leur attaque un pays où les pintes de bière et le whisky coulent à flots, elles vont se frotter à de sérieux adversaires en ce domaine...
Sans doute biberonné aux comédies 80's de ce type, Jon Wright n'a pas oublié les ingrédients essentiels à leur réussite : des personnages suffisamment forts et réels pour que l'on s'attache à eux, une menace aussi fantastique que crédible et, surtout, un humour qui ne sacrifie ni l'un ni l'autre au profit de la simple bonne vanne mais qui les relie plutôt entre eux avec une savoureuse absurdité. Et c'est exactement la recette que va appliquer à la lettre le réalisateur pour son deuxième long-métrage.
Alors que l'invasion alien se profile au fil d'attaques de plus en plus violentes, "Grabbers" prend le temps de nous attacher intelligemment à la galerie de personnages hauts en couleur qui peuplent le petit village théâtre d'évènements pour le moins curieux. Entre son héros policier alcoolique jusqu'à la moelle, une nouvelle jolie recrue obsédée par son travail, un vieux pêcheur accroché à ses pintes ou encore un scientifique un brin coincé, le film s'amuse toujours à frôler la caricature pour mieux chercher à humaniser ces stéréotypes sur pattes à travers son humour so british qui fonctionne à plein régime. Dans la deuxième partie, une fois ceux-ci habilement construits et pleinement conscients des tenants et aboutissants de la menace à laquelle ils sont confrontés, Jon Wright lâche la bride et ordonne l'assaut de ces aliens tentaculaires sur le bar où sont réunis les habitants de la petite ville. S'ensuivra un chouette affrontement où la bonne humeur des effluves de fun et d'alcool sera toujours accompagnée de la générosité ressentie devant les combats avec les créatures. En trouvant ce bonne équilibre de comédie horrifique où le mélange des deux registres les amène à se confondre pleinement, "Grabbers" tient son pitch improbable jusqu'à son terme, bien servi par des effets spéciaux impressionnants pour un si petit budget, des comédiens qui donnent sérieusement envie de trinquer avec eux et un humour qui vise juste au vu du nombre de sourires déclenchés.
Néanmoins, malgré toutes ses bonnes intentions, on pourra juste regretter que le long-métrage respecte finalement un peu trop le schéma narratif de ses aînés, le fait de ne pas véritablement dévier de cette voie déjà tracée l'empêche très certainement de créer un véritable effet de surprise constant, comme avait su le faire "Shaun of the Dead" par exemple. Si l'on s'y amuse tout de même beaucoup, un sentiment de "il-y-a-sûrement-moyen-de-faire-un-truc-encore-plus-fou" pointe le bout de son nez en bout de course, faisant de "Grabbers" une comédie SF remplissant parfaitement toutes les clauses de son contrat sur les rires, les bons personnages et les aliens visqueux à souhait mais qui ne respecte pas celle de la folie promise à 100%.
Un défaut bien présent mais que l'on pardonnera, boire un verre au pub de ce village infesté de bestioles bizarres était malgré tout rudement sympathique. Allez, la prochaine tournée est pour moi !