Grabbers dispose de trois qualités essentielles qui font de lui un petit divertissement sympathique. La première qualité réside dans son idée de monstre à tentacules que l’on combat par l’alcool, puisque celui-ci ne le tient pas dans une Irlande grande buveuse qui se descend plusieurs chopes à la fois – parole de grand-mère ! La deuxième qualité tient à ses effets visuels très réussis, d’autant plus réussis que le budget du long métrage n’est guère important (un peu plus de cinq millions de dollars) : les créatures s’avèrent crédibles et menacent les personnages, l’interaction avec les humains est soignée, la conception esthétique desdits monstres elle aussi originale, notamment en ce qui concerne les rejetons qui ne sont pas sans rappeler les vers de terre sur pattes du deuxième volet de la saga Tremors – notons au passage le même radical dans Graboïds et Grabbers, soit le verbe to grab, « saisir », qui insiste davantage sur la parenté des deux œuvres. Enfin, la troisième qualité est musicale : le compositeur Christian Henson signe une partition instrumentale remarquable qui développe une série de thèmes qui s’ajustent aux situations et s’emmêlent lorsque l’épouvante frappe les côtes irlandaises.


Quelques idées de mise en scène, notamment un plan circulaire qui part de l’appareil photo du policier ivre pour arriver au monstre qui s’avance en sa direction, mouvement répété trois fois afin de mesurer la progression de la menace, rattrapent une réalisation souvent approximative ou exécutée à la va-vite, plus utilitaire que véritablement réfléchie. Car ces bons points ne sauraient occulter la faible caractérisation des personnages, qui ne sont que des caricatures ambulantes, auxquels nous spectateurs ne nous attachons que peu, réduisant drastiquement notre immersion au sein du film. De plus, l’ensemble paraît écartelé entre deux postures conciliées avec peine : l’épouvante et la comédie. Si la séquence d’ouverture installe un climat de tension saisissant, la suite bâcle son travail du frisson puisque constamment entrecoupé de scènes voulues rigolotes devant lesquelles on ne rit guère, jusqu’à l’acmé alcoolique qui manque de folie et de maîtrise. On pense beaucoup au cinéma d’Edgar Wright, la puissance de mise en scène et l’art du décalage en moins. Grabbers reste une curiosité à découvrir et prouve qu’un budget modeste ne constitue pas forcément un frein à la créativité.

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le 18 nov. 2020

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