Grave possédait d'un film atypique, voire même unique dans son genre. Il reposait sur un concept aguicheur : une végétarienne entre à l'université et devient cannibale après avoir goûté à la viande, menant à un métrage gore et ancré dans le renouveau du film d'horreur franco-belge.
Curieusement, Grave remplit certaines de mes attentes tout en se différenciant de ce que j'avais prévu. Observer sa propre université sous cette caméra variable plante un décor singulier qui ont beaucoup aidé à mon immersion, mais je ne savais pas que la thématique du baptême estudiantin serait aussi central dans le propos du film.
Ce choix constitue une qualité comme un défaut. Là réside le principal problème que j'ai rencontré avec Grave : son manque de réalisme malgré son contexte qui s'y prêtait. Sans être spécialiste des baptêmes, les traits et les événements sont largement exagérés pour les besoins du scénario, qui cherche à prouver une seule chose : le milieu social influe les personnes et les force à commettre des atrocités, un message fort peu inédit.
Je veux bien croire que les bizutés peuvent recevoir des litres de sang en pleine figure. En revanche, forcer les gens à coucher ensemble, extirper les gens de leurs sommeil pour balancer les lits hors de leur chambre ou filmer une fille en train de manger un cadavre, ça ne me semble pas très légal.
Tout le film semble être une âpre critique au milieu vétérinaire estudiantin, tous ses éléments sont représentés selon une vision péjorative : les professeurs antipathiques, les étudiants irresponsables, tout y passe.
Heureusement, nonobstant cet aspect rédhibitoire du scénario, le film s'en sort très bien. Un excellent mélange des genres : souvent, il suscite davantage le rire que la peur, mais il ne laisse pas indifférent et contient de nombreuses scènes d'anthologie que l'on peut raconter allègrement à tous nos amis !
Justine mangeant le doigt de sa soeur sous fond d'une grande musique, Justine qui se bagarre avec sa sœur pendant qu'elle se mangent mutuellement leur chair, Justine qui embrasse et lèche son propre reflet sous fond de musique étrange, Justine qui se dépucelle avec son ami homosexuel tout en goûtant avidement sa chair, pour manger sa jambe et le tuer la seconde fois avec "l'aide" de sa sœur...
Face à la maîtrise de cette héroïne si unique en son genre, les quelques défauts d'écriture, tel les dialogues de certains personnages jeunes qui sonnent faux, Alex qui est difficilement supportable et le manque de réalisme du récit, la transition de Justine d'une jeune fille timide à une cannibale/psychopathe/narcissique fonctionne à merveille, l'actrice prend vraiment du plaisir à incarner ce rôle, même si la mise en scène en fait parfois des tonnes.
Bon film ou pas, Grave s'avère mémorable à travers tout son déroulement, jusqu'à son twist final qui survient abruptement dans un récit gagnant peut-être à être mieux développé. Un plaisir assez avoué pour une expérience originale !