Sortant à peine de l’adolescence, Justine est une gamine surdouée. Comme ses deux parents ainsi que sa soeur, Alexia, elle est végétarienne, et se destine à la profession de vétérinaire. Elle rentre en première année tandis qu’Alexia entame sa seconde. Justine découvre les « joies » du bizutage et observent les autres membres de sa promotion, plus particulièrement le fougueux et magnétique Adrien. Elle peut compter sur sa soeur, qui a connu des phénomènes semblables, pour la guider dans ce nouveau monde qui s’impose au fond plus qu’il ne s’offre à elle. Comme pour beaucoup d’autres jeunes de son âge, Justine se prend surtout de plein fouet cette étape essentielle et parfois fatidique où le corps change, et où certaines pulsions comportent plus d’enjeux primordiaux. Pour ne plus être une bizu, Justine va devoir se soumettre à un dernier obstacle et non des moindres : ingurgiter un foie de lapin. Cet événement, potentiellement déjà hautement traumatique pour n’importe quel végétarien, va révéler chez Justine des maux et des obsessions encore plus spectaculaires. Quelque chose d’autrement plus grave…
Bien qu’on la réduise trop souvent dans la presse à son passage par la Fémis, la jeune Julia Ducournau n’en est pas à son coup d’esssai. Son Mange de 2011, réalisé pour Canal+, où elle dirigeait déjà la très talentueuse Garance Marillier, traitait lui aussi, certes sous des contours légèrement plus « comiques », des troubles alimentaires et de ce qui touche à la transformation du corps. Fille de médecins, elle a très tôt banalisé la vision du sang, des blessures et les informations à sa disposition sur diverses pathologies plus épouvantables les unes que les autres.
En bonne hypocondriaque (et oui…) et en férue de psychanalyse, elle ne nous fera pas croire que Grave ne cache pas quelque chose d’autrement plus subtile qu’une initiation gonzo au cannibalisme. Parce que même sans verser dans la spéculation analytique hasardeuse, il convient de rappeler qu’on met toujours un peu de soi dans ce que l’on crée.
Le personnage de Justine est pour moi une métaphore, un symbole générationnel des maux qui rongent notre société. Déshumanisée et réactionnaire.
(lire la suite de la critique sur le site de l'ombre sur la mesure ici