Début 2010. L’annonce en coup de poing qui n’a l’air d’affecter que moi. Alfonso Cuarón, LE mec qui est derrière Les Fils de l’Homme, se lance dans un projet de film spatial. Déja, Les Fils de l’Homme est et demeure un de mes films fétiches. Et savoir que le réalisateur s’attaque à un de mes genres préférés, en l’occurence le film spatial (Sunshine, Alien, 2001, Event Horizon, Moon, Mission to Mars), ça devenait d’emblée le film que j’attendais le plus durant ces prochaines années. Et c’est devenu Gravity.

Petit rappel du pitch: une scientifique astronaute se retrouve catapultée dans l’espace suite à la présence de débris filant à grande vitesse. Elle va devoir se dépasser pour s’en sortir et trouver un moyen de rentrer sur Terre. Une histoire simple, qui a l’air, en posant la question aux gens qui ne l’avaient pas vu, de poser quelques doutes quand à l’intérêt du film. La majorité des gens m’ont demandé si c’était vraiment bien. En voyant la bande-annonce, ils pensaient que le film avait un intérêt limité puisqu’on ne voyait qu’une femme astronaute virevolter dans l’espace. Evidemment, le nom du réalisateur ou les échos concernant la techno du film ne parvient pas toujours aux oreilles du grand public, leur question était ma foi légitime.

Et la grande force du métrage, celle qui nous prend aux tripes et qui nous faire dire qu’on est en train de vivre un moment incroyable, c’est cette réalisation, cette immersion, presque jouissive tellement on a toujours rêvé de voguer dans l’espace et dont on ne sait pas si ça sera possible de notre vivant. Le film s’introduit sur un plan séquence d’une vingtaine de minutes, absolument fantastique, avec une caméra qui flotte au-dessus des personnages vaquant à leurs occupations, comme si de rien n’était. Comme si on était avec eux, profitant juste du spectacle d’un espace sidérale, vide, froid et sans pitié. La technique y est incroyable. Les mouvements paraissent naturels. La Terre vue de l’espace paraît tellement réel. On sent les montagnes, les mers, les nuages qui flottent au-dessus, on sent une véritable profondeur comme on en a jamais vu. Sans aucun son, seulement les personnages qui discutent, quelques bruits sourds et une musique légère, pas envahissante, dont la mélodie est un doux accompagnement au spectacle qui s’offre devant nos yeux.

Le film se transforme très vite en film de survie, mélangé de film catastrophe. Ceux qui ont lu le manga Planètes (que je recommande chaudement) sauront dans quelles conditions va évoluer la scientifique Ryan Stone. Surtout, le film se veut très réaliste. L’utilisation de l’oxygène, la gravité zéro, les poussées des vaisseaux, le son, tout ça participe énormément à la tension du film et à des séquences impressionnantes où on reste sérieusement accroché à son siège. Peut-être que certains points peuvent paraître non cohérents pour certains (personnellement, ce n’est pas le cas), mais vu que le nombre de personnes qui ont déjà été dans l’espace pour vérifier les points du film est assez restreint, on va dire que les haters qui critiqueront la crédibilité du film auront du mal à justifier leurs arguments. Les multiples plans séquences participent à cet effet de tension, et ça permet d’être constamment immergé dans le film, sans perdre le fil de l’action. Et tout ça en rendant la caméra claire et précise. Un véritable exploit quand on voit la masse de films où les réals ne savent pas toujours tenir une caméra…

On a aussi salué la performance de Sandra Bullock. A vrai dire, ce n’est pas usurpé: l’actrice est ici dans un de ses meilleurs rôles, si ce n’est le meilleur, et on sent que Cuarón l’a poussé dans ses derniers retranchements. Clooney fait le mec qui cabotine, mais c’est essentiel dans le film et ça permet d’avoir un certain souffle, de ne pas être étouffé, tout en apportant un petit quelque chose indispensable pour le personnage de Bullock. Bref, un film qui compte aussi sur ses acteurs, sans les sacrifier sur l’autel de la technique, et c’est tant mieux.

On arrive au petit bémol, qui peut ne pas en être un suivant la façon dont vous appréhendez le film. Le métrage ne dure qu’1h30, ce qui est peu pour la majorité des films, mais en discutant avec pas mal de gens, ils étaient assez content finalement, la plupart en ont marre des films qui dure 2h30. Sauf que sur Gravity, le film est censé être un film de survie. Ce genre est un prétexte pour apporter un personnage à priori faible en début de film et qui en sort grandi et donc plus apte à affronter beaucoup plus de dangers qu’au début. Le film ne lâche pas le spectateur une seule seconde, même s’il y a quelques moments de pause, et c’est peut-être le petit reproche qu’on pourrait lui faire: d’aller très vite. Tout est très condensé, très éprouvant. Il manque peut-être une ou deux scènes qui développent un peu plus les personnages et leur caractère, pour encore plus appuyer ce côté « survie ». A la fin du film, j’étais heureux, mais j’ai pas pu m’enlever de la tête que le film avait ce côté « Futuroscope ». Cinématographiquement, il est impeccable, mais la durée du film couplée à cette expérience jamais vu donnait l’impression d’avoir fait le tour d’une attraction pour en mettre plein la vue. Je ne trouve pas que ce soit un défaut en soit, mais certaines personnes pourraient mal le prendre.

Quoi qu’il en soit, Gravity est à voir. Et en 3D. Moi qui suit un fervent défenseur de cette bonne vieille 2D, le film vaut clairement le coup en relief et renforce encore plus l’immersion, à tel point que je me demande si les sensations seront les mêmes en blu-ray 2D sur une télé. Mais le film est unique, Cuarón a prouvé une nouvelle fois qu’il était clairement à part, et qu’il était capable de créer un film spécial, particulièrement immersif sans sacrifier le cinéma au détriment du spectaculaire. Un vrai tour de force, une vraie expérience de cinéma, qu’on ne reverra pas de sitôt. Espérons que Gravity soit le précurseur de quelque chose. Si ce n’est pas le cas, au moins, on aura eu Gravity.

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le 20 oct. 2013

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Cronos

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