Je crois que je ne cesserai jamais d’envier tous les chanceux qui ont vu Gravity au cinéma, me laissant devant mon iMac à l’écran tellement plus réduit, en train de me dire que je n’ai encore jamais vu en salle obscure de film 3D digne de ce nom. Mes seuls coups d’essai restent à ce jour Star Wars I (ouille !), Titanic (aïe !) et Moi, Moche Et Méchant 2 (arrrrrgh !). A la lecture de toutes vos critiques élogieuses sur l’aspect immersif de l’œuvre, j’avais anticipé que la carrière de Gravity dans la petite lucarne serait limitée. J’avais raison…ou presque.

Car j’avais tort en a partie, car si l’on sent bien que la 3D manque, le fait de le voir en HD et en version originale conserve beaucoup de l’intérêt esthétique de Sandra Bullock…et accessoirement de la planète terre vue du ciel. Je sais que l’expérience aurait été toute autre en salle, mais je me suis contenté d’un espace infini stupéfiant d’une angoissante beauté. Les effets spéciaux sont sublimes de perfection, nous tenons là un des premiers films dans lequel le vrai devient difficile à démêler du faux. Peut-être qu’en l’absence de la 3D, j’ai perdu l’essentiel du film, pourtant le plaisir était bien présent tout au long, même si par moments, il m’est arrivé de me demander si j’avais pris un plaisir différent de celui vécu au Futuroscope devant un écran hémisphérique qui diffusait en 3D des images d’astronautes travaillant sur la station spatiale internationale.

Car c’est vrai, le scénario est mince puisqu’il s’en prend encore à cet imbécile de Poutine qui se débarrasse d’un satellite en lançant un missile qui engendre des débris, qui vont frapper d’autres satellites, qui engendrent encore des débris. Le tout lancé à 30 000 kms/h dans l’espace, droit sur l’orbite d’une navette américaine en maintenance sur Hubble. C’est très efficace tout ça, ces débris qui reviennent frapper toutes les 90 minutes ceux qui se trouvent sur leur passage. Le suspens est entretenu sous la forme d’une épée de Damoclès suspendue au-dessus de nos astronautes. On se retrouve dans le schéma de l’héroïne qui tente de sauver sa peau et qui, à chaque fois qu’elle semble sur le point d’y parvenir, se prend un autre pépin sur la tête. Soit dit en passant, le canot de sauvetage spatial vide de carburant est un peu dur à avaler comme pépin, ce qui n’empêche que ça reste diablement efficace et prenant.

Je l’admets sans rougir, cette chère petite Sandra que j’ai toujours considéré comme une des actrices les mieux balancées d’Hollywood (à défaut d’être bonne actrice), prouve que des actrices peuvent assumer le passage du temps aussi bien que des acteurs et accessoirement, que cette mode des cougars (toujours aussi laid ce terme…) n’est en rien due au hasard. Enfin, les hommes découvrent qu’une femme peut être désirée et désirable passés les cinquante ans. Elle se permet même ici de livrer une prestation tout à fait honorable à défaut d’être mémorable. En bon sparring-partner, George Clooney joue les roublards professionnels mais occupe trop peu d’écran, à croire que Nespresso l’empêche de tourner.

Il me reste tout de même une question, c’est quoi cette comparaison fumeuse avec 2001, l’Odyssée De l’Espace ? A croire que l’un ou l’autre des films a été compris de travers. Si cela se limite au fait que les deux parlent de l’espace c’est un peu court jeunes gens. D’un côté on a un film de science-fiction, de l’autre un film tout à fait réaliste (qui n’a rien de science-fiction). D’un côté on a un film obscur, réflexif et profond, de l’autre on a un pur film d’action et de divertissement qui n’a d’autre ambition que de nous coller au fauteuil, ce qu’il fait à merveille.

De là découle cette note généreuse attribuée à un film qui a su me faire monter tout là-haut où rien n’existe, où le néant est roi au pays des cris silencieux. Cet espace où la beauté et l’ampleur des paysages sont ce qu’il y a de plus effrayant, où l’être humain devient un être handicapé, incapable de se sortir des obstacles qu’il maîtrise si bien lorsqu’il est dans son élément. A défaut de la profondeur philosophique de ses ainés, Gravity procure une profondeur émotionnelle rare et laisse perplexe sur l’avenir de la race humaine dans un univers qu’elle ne semble toujours pas prête à affronter.
Jambalaya
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le 13 févr. 2014

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Jambalaya

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