Toujours dans ma nouvelle série "je me mate des films de Noël", le visionnage de Gremlins arrivait donc. Gremlins, c'est un peu l'archétype du film de l'enfance, pour moi : il fait un peu peur sur les bords - quand on est jeune -, il fait un peu rire, même si parfois, on ne sait pas toujours pourquoi - c'est le sens de la blague que tu comprends que dix ans plus tard - et il flirte assez librement avec les interdits - c'est carrément de l'initiation au gore ! Et pourtant, je ne me l'étais pas maté depuis un moment. Allez savoir pourquoi, les films d'enfance qui me sont restés les plus chers sont les sagas Star Wars et Indiana Jones. Et pourtant, ça me manquait un peu, faut bien avouer, cette ambiance de bordel, ce chaos nocturne, avec petites bêtes anarchiques à la clé.

Comme disait l'autre, pour avoir un bon film, faut un bon méchant. Et les Gremlins, c'est clairement d'excellents méchants. J'avais pas idée de combien le film mettait en avant ces petits monstres comme des antagonistes, certes, pour les héros, mais pas fondamentalement de vrais et ignobles méchants. Ils ne cherchent pas du tout la fin du monde, la domination, la gloire et l'argent au détriment des autres. Que non. Ils cherchent à s'éclater comme des malades, à s'amuser, au détriment de tout le monde, y compris de leurs propres camarades. Ils forment le chaos pur et enfantin, visant uniquement à la satisfaction à court terme de leurs pulsions les plus immédiates. En gros, ce sont les personnages parfaits pour un film pour enfant, puisqu'ils permettent au réalisateur de flirter librement avec moult interdits, des blagues sur l'exhibition jusqu'au gore le plus outrancier. A ce titre, la mère de famille carbonise à elle seule trois de ces petites bêtes, et de façon assez ignoble à chaque fois (spéciale dédicace au micro-onde !). D'ailleurs, c'est cool qu'elle soit le personnage le plus féroce et guerrier du film, parce qu'hormis son coup d'audace, la petite copine du héros sert quand même assez vulgairement de faire-valoir, mais bon, on se rassure : tous les personnages humains servent de faire-valoir aux Gremlins.

Ce qui est cool, aussi, c'est l'espèce de pluralité des tons que permettent les Gremlins. On a quelques bons gros passages inquiétants, utilisant les codes du film d'horreur (l'éclosion des cocons en particulier, avec le pauvre Gizmo perdu au milieu, ça m'avait collé une trouille noire !). Et il y a le gore, et quel gore. Sérieux, je le disais outrancier, mais la mama qui enfonce la tête d'un Gremlin dans son mixeur, c'est pas spécialement pour lui apprendre à compter ! Et encore, je parle même pas de la séquence finale, où le méchant meurt de façon assez dégueulasse. C'est marrant, parce que tout ça était assez violent, au final (bordel, le mec fond quoi !), mais avec de la pâte verdâtre, ça passe. Ça s'asperge de sang de Gremlins sans grand complexe, mais les enfants rigolent. Comme quoi, tous des putains de bouchers, même à leur âge. On passe aussi sur les blagues un poil plus méta, les références multiples aux films pour les grands (le gremlins Humphrey Bogart qui fait sa scène de détective privé, gâché par l'arrivée impromptu d'un de ses congénères) : le Gremlin offre une liberté de ton assez hallucinante, de toute façon ! Et puis, comme c'est Joe Dante et qu'il aime le cinéma, on remarquera aussi que c'est la passion des gremlins autant que leur tombeau, une façon amusante de rendre à César ce qui est à César.

Au final, c'est plutôt cathartique comme film, qu'on soit petit ou grand, même. Entre les blagues potaches de cette gueule de Dick Miller sur les étrangers et les références qui pleuvent, le revoir après tant de temps fut comme une espèce d'énorme madeleine de Proust pré-horrifique. C'est surtout l'occasion de faire un bilan : depuis longtemps, pour moi, Gremlins était l'archétype du film "pour enfants" et pourtant, il est quand même assez permissif dans ses séquences, voire même plutôt glauque, sans pour autant que cela ne gêne réellement le visionnage ni l'âme enfantine - et ne transforme encore moins les marmots en serial killer. Alors pourquoi maintenant, quand on fait un film à destination du jeune public, on le formate d'horribles manières et on oublie l'essentiel : l'enfance, c'est encore le temps de la découverte, certes, mais aussi du chaos et de l'anarchie. Et les Gremlins, c'est ça.
0eil
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le 4 déc. 2014

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