Il serait facile de dire de Hong Sang-soo qu'il réalise toujours le même film, ressassant jusqu'à plus soif (terme de circonstance) les mêmes thèmes. Ce serait facile, pas complètement faux et terriblement réducteur. Le cinéaste sud-coréen qui a porté à son pinacle l'indécision amoureuse et l'art des dialogues n'en finit pas de réinventer son cinéma, d'y apporter des variations infimes ouvrant à toujours plus de possibilités. Un cinéma de l'abysse et de l'épuisement des possibilités qui, film après film, dans une régularité stakhanoviste rendue seulement possible par les faibles moyens et la modestie du dispositif, tape dans sa boite de madeleines très proustiennes. On connait dorénavant par cœur les longs plans fixes, les échanges fournis entre deux personnages pareillement filmés de profil, les repas alcoolisés plus que de raison où le ton parfois monte, les déambulations propices aux confessions dans le parc local. On retrouve ces lointains cousins asiatiques des héros de Rohmer avec toujours le même plaisir, même si la mélancolie s'inscrit davantage dans le paysage. Le motif de l'endormissement qui brouille la frontière entre rêve et réalité placera à son tour le spectateur dans un état de doux abandon et de demi-sommeil où sa propre sphère onirique ne manquera pas de confluer avec celle de Haewon et ses hommes. Avec ses zooms anachroniques, son parti pris d'une simplicité qui confine à la radicalité, Hong Sang-soo continue à assurer la pérennité d'une certaine Nouvelle Vague française. Pour notre plus grand bonheur.
PatrickBraganti
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le 11 déc. 2013

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