Takeshi Kitano est un présentateur à la télévision japonaise. Autant vous dire que les japonais n'ont probablement jamais pu prendre le film au sérieux. En occident, on s'attend à voir un film de sabre avec des yakuzas et beaucoup de sang. Tout est une question de cultures.
Hana-Bi mélange une violence exagérée, de la poésie et de l'onirisme, dans un rythme calme et qui détend presque le spectateur. Sa thématique du deuil fait penser au dernier film de Kurosawa, Madadayo. Un cerf-volant, une fillette, et deux balles hors-champ, laissant planer le doute chez le spectateur. Un yakuza ? Un suicide ? Ou peut-être a-t-il tué sa femme pour mettre fin à ce rêve où tout semble trop beau, sans être dénué de perfectionnisme. Le feu d'artifice défectueux, la femme tombant ridiculement dans la neige, et bien sûr l'élément perturbateur principal, les yakuzas, victimes des violences presque irréelles de Kitano.
"Pourquoi arroser une fleur morte ?", demande un homme. Sous-entendu, pourquoi s'occuper d'une femme en phase terminale de cancer ? Pour l'accompagner à la fin de son voyage, ou pour croire en l'illusion, le rêve qu'elle est et restera. Le cerf-volant et les deux coups de feux laissent croire à la fin du voyage et au moment du deuil.
L'ami policier de Kitano, paraplégique, en revanche n'accepte pas de faire le deuil de sa femme et de sa fille, qui l'ont abandonnées. Il déprime, se laisse prendre par la marée, et ne cesse de se peindre avec sa femme et sa fille.
Les nombreuses peintures présentent dans le film montrent des animaux à tête de fleur, rappelant la même question : pourquoi arroser une fleur morte ?
La peinture la plus mémorable du film reste le film lui-même, où tournesols et sang cohabitent, entre les fourrières dévastées et une route auprès de la mer, qui évoque un autre film avec une musique de Joe Hisaishi, Ponyo sur la falaise.
Avec Hana-Bi, Hisaishi signe une musique douce, lente, et mélancolique, sans doute une des musiques les plus mémorables du cinéma japonais.
Hana-Bi est un feu d'artifice, dont le bouquet final resplendit de toutes ses couleurs.
Pourquoi arroser une fleur morte ? Je vous laisse y répondre.
8/10.

Virgule1
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de 1997, Les meilleurs films asiatiques et L'Odyséee des revisionnages : 2023

Créée

le 27 sept. 2019

Critique lue 1K fois

Virgule1

Écrit par

Critique lue 1K fois

D'autres avis sur Hana-bi

Hana-bi
real_folk_blues
10

Dirty arigato

Une musique composée de cordes enjouées, planante et tournée vers les nuages. Puis deux visages ahuris et du bitume face au portrait craché d'un homme en deuil. Un coup de serpillère imbibée violent...

le 28 juin 2012

168 j'aime

40

Hana-bi
Ze_Big_Nowhere
9

Feu d'artifice

Hana-Bi c'est... Un poème. Une poésie tragique. C'est une ballade désenchantée vers le gouffre. C'est cette violence sans fard qui éclabousse de rouge les visages et les toiles. C'est cette...

le 1 sept. 2013

106 j'aime

15

Hana-bi
Rawi
10

Kitano qui rit, Takeshi qui pleure.

Comment expliquer le plaisir de retrouver les personnages de ce film, après quelques années d'éloignement ? Hana-bi tient et tiendra toujours une place particulière dans ma cinéphilie. Il a été mon...

Par

le 30 mars 2015

78 j'aime

11

Du même critique

Memoria
Virgule1
3

Every Frame A Painting ?

Le cinéma est un art aux conceptions diverses, un art multiple, entre ce qui s'apparente à du théâtre filmé ou à de la littérature, ou au contraire une idée bien plus visuelle de l'art, un mélange...

le 18 nov. 2021

26 j'aime

53

After Blue (Paradis sale)
Virgule1
1

Science fictive

After Blue (Paradis sale) est symptomatique d'un cinéma mort-né, qui, dès les premières minutes et jusqu'aux dernières n'a rien à dire, rien à montrer et surtout rien en quoi croire, pas même en...

le 27 févr. 2022

22 j'aime

11

Incroyable mais vrai
Virgule1
9

Retour vers le chien andalou

Le cinéma de Quentin Dupieux a toujours été aux prises avec le naturalisme, la Réalité dira-t-on. Éminemment fictif car absurde donc contraire à toute logique réelle, c'est un cinéma qui se place...

le 19 juin 2022

20 j'aime

5