Maîtres de Kung Fu contre gang nazi dans un futur post apocalyptique

Film quasiment oublié, Health Warning mériterait d'être redécouvert tant il est l'un des objets filmique le plus étrange que Hong Kong ait produit. Les informations sur sa genèse sont quasi inexistantes mais on peut tout de même faire quelques observations d'ordre générales. Tourné avec un budget qu'on devine très faible, Flash Future Kung Fu (son aka) a tout d'un projet estampillé « nouvelle vague », tendance fin de période : Une approche qui se veut réaliste, un sujet original/novateur sous un aspect plus commercial (le film de Kung Fu ici). Kirk Wong ne pouvant se permettre des grandes stars, il fait appel à des acteurs de second rang, des professionnels donc même si ils n'ont que rarement eu l'honneur des premiers rôles. C'est probablement la meilleure idée du film... Johnny Wang, certainement séduit par l'idée et le fait que le film lui réserve de nombreuses scènes d'action, accepte donc de s'embarquer dans l'aventure. Ce sera un des seuls films de sa carrière où il est autant mis en avant.

Pour construire son histoire, Kirk Wong s'inspire de la vague post apocalyptique alors en vogue, assemblée avec la tendance d'anticipation pessimiste qui a régnée dans les années 70. Et, histoire que le film parle quand même au public local, il rajoute les bases classique du film de Kung Fu avec les rivalités d'écoles et ses artistes martiaux belliqueux. L'idée est séduisante sur le papier, mais le résultat à l'écran est tout simplement incompréhensible. Il faut croire que Wong n'avait pas de scénario établi quand il a commencé le tournage pour obtenir un tel résultat final.

Un des principaux ratages tient à l'univers mis en place dans le film qui ne parvient jamais à se montrer crédible. Bien sur, on n'a aucune indication sur le lieu ou le temps supposé de l'action. En soi ce n'est pas forcément grave. Là où ça commence à devenir gênant, c'est qu'on ne dispose jamais d'informations claires sur la situation du monde dans lequel évoluent les personnages. Pourquoi le monde en est là ? Quelles sont les forces en présence et que cherchent elles ? Tout cela, on ne le saura jamais... On voit bien qu'il y a une école d'arts martiaux, des espèces de nazis ou des clubs aux activités déviantes mais la façon dont tous ces éléments interagissent entre eux est particulièrement obscure. Kirk Wong essaye de s'en sortir en conservant une ligne directrice simple (en gros une banale histoire de vengeance) à son récit mais l'absence d'éléments narratifs solides pour l'appuyer rendent sa tentative vouée à l'échec. Un exemple : La mort d'un des membres de l'école, à la source du combat contre les nazis, n'a aucune explication à quelque moment que ce soit. Le pauvre spectateur ne peut être que perdu face à un tel amateurisme scénaristique !

Si au moins le film pouvait compenser par un visuel envoûtant, faire oublier ses défauts de scénario par une ambiance propre... Las ! L'univers Mad Maxien de Health Warning est constitué de bouts de ficelles qui feraient honte à un film de Richard J. Thomson (réalisateur de Z Français). Etant donné le budget, les contraintes géographiques locales (HK c'est pas l'Australie !) et l'absence de savoir faire Hong Kongais pour les histoires d'anticipation, c'était à prévoir. Mais même avec tout cela en tête, il est difficile de ne pas avoir honte pour l'ensemble de l'équipe technique, parce que même avec la meilleure volonté 2/3 tuyaux, quelques masques à oxygènes et des éclairages puissants, ça ne fait pas un univers de SF crédible... Le pire tient probablement à l'usage de l'attirail nazi. Wong place des drapeaux par ci par là mais ne semble jamais vraiment comprendre le sens que cela recouvre. A croire qu'il s'était dit un jour : « Tiens, c'est cool ces machins, faudra que je le réutilise dans un de mes films ! ». Mauvais goût ou simple naïveté, la question reste ouverte... Mais comme pour l'ensemble de l'histoire du film, n'attendez aucune réponse !

Les acteurs semblent perdus, et on les comprend ! Les personnages qu'ils interprètent ont une personnalité inexistante. L'exemple le plus frappant est le personnage d'Eddie Ko qui ne doit pas avoir plus de 20 lignes de dialogues. Le brave Eddie passe donc son temps à arborer une expression fermée pendant tout le film. Difficile de s'intéresser à de tels personnage. Le seul qui remonte le niveau, c'est l'excellent Johnny Wang. Non pas que son personnage soit plus développé (sa personnalité peut être résumé juste par son nom : Killer !), mais l'énergie qu'il déploie pendant tout le film force le respect.

Il faut dire qu'à défaut d'avoir fait un bon film, Wong a été généreux niveau quantité d'action. Cela rend la chose un peu plus regardable, c'est déjà ça ! Mais même là, il ne faut pas s'attendre à la panacée. Les combats du début sont en effet assez poussifs. Wong cherche à être réaliste mais ne parvient pas à donner de rythme aux affrontements. Les choses s'améliorent heureusement au fur et à mesure que le film progresse. La hargne que met Johnny Wang, un choix d'adversaires plus intéressant (dont Elvis Tsui en boxeur Thai nazi ! Mieux vaut ne pas chercher le pourquoi de cette étrange combinaison...) et une chorégraphie plus complexe permettent, enfin, de prendre un peu de plaisir à la vision du film. Le final, sur un ring nazi ( ! ), est même franchement réussi. Dommage qu'il ait fallu attendre une heure pour ça...

Nanar étrange, mal foutu, presque attachant tant il est raté, Health Warning pourra faire le bonheur des amateurs de spectacles « autres ». Par la suite, Kirk Wong ne touchera plus à la SF et se spécialisera dans le polar. Au vu du film, on comprend pourquoi...
Palplathune
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le 1 mars 2011

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Palplathune

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