Un homme en instance de divorce tombe amoureux de son système d’exploitation informatique. Bien. Le pitch paraît pauvre. On aurait presque envie de rire. On pourrait se dire : « Quel cliché ! Maintenant que l’on vit dans l’ère du numérique, que le progrès informatique est constant, que les inventions technologiques vont toujours plus loin, on s’imagine que l’homme, un jour, ne pourra plus faire la différence entre réel et virtuel. Après les robots, les systèmes d’exploitation… Et après ? On tombera amoureux de notre voiture ? De notre GPS ?... ». On pourrait. Seulement voilà, au sortir de la séance de cinéma, on ne le dit pas.
Joaquin Phoenix est presque seul tout au long du film. Presque, puisque la voix de Samantha l’accompagne. Et c’est là que réside toute la magie. Elle devient « quelqu’un ». Alors même si à l’image on ne la voit pas, on l’imagine très bien. Le film rend le spectateur actif de l’histoire d’amour qui se déroule sous ses yeux : c’est lui qui imagine cette femme. Romance d’un autre monde, avec, en fond, morceaux de piano ou Arcade Fire qui nous transportent.
A travers des décors mi-futuristes mi-kitsch, ce monde totalement individualiste, où toute personne se déplace en discutant avec la petite boîte renfermant son système d’exploitation, nous absorbe totalement. Theodore Wombly, inconsolable après sa séparation, nous touche par les mots doux qu’il écrit dans des « lettres adressées à d’autres de la part d’un autre », parce que, dans sa solitude, il tombe amoureux d’une voix qui ne laisse personne de marbre, parce que cette voix, c’est celle qui nous manque à tous, la présence constante à qui l’on fait appel quand on en a besoin, la voix qui se transforme aussi en oreille pour nous écouter, et parce que, finalement, Theodore ça pourrait être nous…
Ni une critique de notre société, ni un cliché plongeant sur la technologie, Her réussit à nous frapper. Parce que « her » c’est avant tout « us ». Au bout d’un moment, la voix s’éteint et nous sommes seuls face au monde, face aux autres, avec qui les liens sont les plus forts et nous permettent d’avancer.
Juliette_Moreau
9
Écrit par

Créée

le 7 avr. 2014

Critique lue 399 fois

3 j'aime

4 commentaires

Juliette M

Écrit par

Critique lue 399 fois

3
4

D'autres avis sur Her

Her
Strangelove
9

Siri's paradox.

Looking at the World.Je ne sais pas. Je ne sais pas si c'est moi ou un vrai tour de force, mais ce film m'a ému aux larmes. J'ai ris, j'ai pleuré, je me suis émerveillé devant une telle justesse et...

le 15 févr. 2023

319 j'aime

20

Her
Fraeez
5

New Hipster App Available On Google Play Store!

J’ai un problème, je suis quasi-intolérant au sentimentalisme exagéré. La volonté de vouloir me faire éprouver des émotions en exacerbant toutes les passions produit chez moi une nausée due à un...

le 27 mars 2014

285 j'aime

19

Her
EvyNadler
8

Mauvaise foi

Bon déjà je tiens à préciser que je voulais mettre 5 dès le début. Avant même la première minute. Enfin dès le début quoi du coup. Oui je sais, c'est pas digne d'un critique, c'est pas digne d'un...

le 22 juil. 2014

232 j'aime

21

Du même critique

Lucy
Juliette_Moreau
5

Arrêtez de trop utiliser votre cerveau... et vous apprécierez.

Cela m’attriste de lire tant de critiques de cinéphiles se croyant si « savants » qu’ils jugent Lucy sur sa qualité intellectuelle. Monsieur Besson base, certes, son film sur une citation niaise,...

le 27 août 2014

2 j'aime

4

[REC]³ Genesis
Juliette_Moreau
1

Catastrophe... cinématographique

Je l'avoue, avant de voir ce troisième volet de REC, je n'avais pas du tout lu le synopsis. En voyant le sous-titre "Genesis", je me suis dit "Chouette ! Je vais découvrir les origines de cette...

le 9 mai 2014

1 j'aime

La Rage au ventre
Juliette_Moreau
5

Critique de La Rage au ventre par Juliette M

Devant une bande-annonce coup-de-poing, un montage tranché et une musique qui donne envie de cogner, j'étais convaincue d'aller voir un bon film de boxe à la The Fighter. Il faut l'avouer, Jake...

le 6 août 2015