Aimer la peur

Grande amatrice de films d'horreur depuis l'enfance, je m'ennuyais à voir et revoir les mêmes films avec le même scénario. Tellement que j'en inventais des jeux de "décompression" afin d'aider mes amis les plus réticents au genre horrifique (et même la technique du 1,2,3, soleil avec les monstres/fantômes/possédés/fous).
Hérédité m'a traumatisé et...j'ai aimé ça. Enfin un VRAI film d'horreur. L'atmosphère est pesante, on a pas envie d'être là, on a envie que ça s'arrête, mais on a aussi envie d'en voir plus. Et jusqu'au bout, on est tenu en haleine, on tremble, on a le palpitant qui s'emballe, on a les organes comprimés, bref. On a enfin de la vraie tension et de la vraie peur. (pas juste des screamers nuls qui finissent par agacer plus qu'autre chose.)
Les moments gores sont assumés et ne sont pas juste là pour du blood porn comme bien trop de films d'horreur qui semblent dire: Agrougrou du sang! T'as vu??? Y'a du sang!!! BOUH LE SANG.
Hérédité lui te dit: Du sang? Mais bien sûr. Regarde comme c'est bien foutu sous la peau!
Et on est pas épargné. Ça passe vite, mais suffisamment lentement pour nous enfoncer dans notre malaise. On ressent à 200% ce que les personnages vivent, on a peur avec eux, et on sombre avec eux.
Les plans, les lumières, et les cadrages sont maîtrisés à la perfection. Tout le film fourmille de détails qu'on ne perçoit pas forcément au premier visionnage, et c'est un vrai plaisir que de tout reconstruire pas à pas avec ce que l'on a vu ou entendu.
Les parties du film aux codes "horrifiques" sont assez classiques en soi mais elles réussissent à être terrorisantes grâce à tout ce malaise instauré depuis le début.
Les personnages sont tous parfaitement interprétés. La mère ne sachant pas où se placer avec ses émotions, qui finit par se faire envahir par son chagrin et sa douleur. Le père tentant de tenir sa famille comme il peut, de garder la tête froide, et d'être dans la plus grande bienveillance. Le personnage de Peter, complètement perdu qui essaye d'avancer sans trembler, mais qui a des failles d'adolescent parfaitement normales car il reste néanmoins encore un enfant. Le personnage de Charlie qui semble perdue et à la fois tout à fait consciente de ce qu'elle fait. Et enfin, le personnage de Joan (interprétée par la magistrale Ann Dowd) qui est une main tendue salvatrice et.. Oh et puis vous verrez.

Foncez voir ce bijou aussi attirant qu'effrayant. Préparez le plaid doux et chaud de protection, du sucre, et une bonne sitcom pour décompresser après.