Il reste du jambon ? par NicoBax
Après "La vie est un long fleuve tranquille" qui mettait dos à dos nos beaufs et nos bourgeois, après "Mauvaise foi" qui posait la question de la place de la religion pour un enfant né d'un couple mixte, voilà "Il reste du jambon", petite comédie peu inspirée si ce n'est par l'histoire d'Anne Depetrini et Ramzy Bedia.
Lui est arabe, médecin et un peu perdu entre la culture de ses parents (joués par Fellag et la très efficace Biyouna) et la sienne, issue des quartiers de Nanterre. Elle, est issue d'une famille bourgeoise où le racisme ordinaire est en vigueur. Ils se rencontrent à l'hôpital, ils tombent amoureux et c'est le début des emmerdes, chacun n'assumant que moyennement les tares de sa famille...
On retrouve l'humour de l'ancienne chroniqueuse de Canal+, l'univers absurde et touchant de Ramzy mais c'est loin d'être suffisant. Ramzy peine à sortir de son personnage de gamin attardé et s'il a parfois des accents de sincérité, on se rend bien compte que Jalil et Ramzy ne doivent pas être si éloignés dans la vie... Pour autant, et même s'il a progressé, il y a encore un sacré boulot. Mais je lui reconnais de bons moments, comme à Anne Marivin qui s'en sort beaucoup mieux que souvent, assumant sereinement un rôle un peu casse-gueule.
Le souci, c'est que la réalisatrice a fait l'impasse sur les moments de passion partagée par Juliette et Jalil, on nous impose leur couple comme une évidence dont on n'est malheureusement pas suffisamment complice. Difficile de réellement s'attacher à leur histoire d'amour au-delà de son aspect "militant pour la tolérance".
De ce coté, on ne fait pas dans la subtilité. Le personnage de Sophie (joué par Géraldine Nakache) ne sert qu'à balancer des a priori racistes sur le voile, le mariage forcé, etc... Les parents de Juliette (Marie-France Pisier et Jean-Luc Bideau) idem. Le film use et abuse des clichés, parfois pour les dénoncer, parfois pour les confirmer de façon assez étrange...Un certain manque de subtilité que ne compense pas les seconds rôles : Sophie la copine pleine d'a priori, Mathieu le meilleur pote recueilli par la famille de Jalil est évidemment un super loser qui doit reprendre en main sa vie, le percheman foncedé qui sert à rien, le présentateur à mèche... Ah et j'espère que le César de Leïla Bekhti lui permettra de jouer enfin autre chose que le garçon manqué de cité en jogging...
Il y avait beaucoup de matière pour des scènes comiques mais le choix a été fait de verser dans le pouet pouet et la facilité (le coup du mouton dans la baignoire par exemple). Dommage.
Le plus dommage dans tout ça, c'est que la fin n'apporte pas vraiment de "réponse". "Tout le monde a ses torts mais l'amour est le plus fort, tu m'élargis le champ coco et... top générique !" Quid du fond du problème ? L'important se situait justement APRES la crise, quand les sacs ont été vidés, que les mots ont dépassé la pensée et que l'amour est encore là... On fait comment maintenant ? Dommage de ne pas être allé jusqu'au bout...