L’ignorance et le hasard sont source d’émerveillement.
Mais, ne nous avançons pas trop, j’y reviendrai plus tard.
« Ils m'aimeront quand je serai mort » s’annonçait comme un « Lost in la Mancha » (non sans lien avec Welles qui a eu son propre Don Quichotte avorté) ou un « Jodorowsky's Dune » (non sans lien aussi avec Welles, pour d’autres raisons). L’histoire tragique d’un réalisateur qui n’arrive pas à créer son grand œuvre.
Avec « De l'autre côté du vent », l’idée d’Orson Welles était de faire deux films en un : un long-métrage de fiction réalisé par son personnage J.J. "Jake" Hannaford et un documentaire sur le tournage du film d’Hannaford. L’idée est complexe, ambitieuse, inédite. L’ensemble a l’allure d’un puzzle géant, dont seul Welles connaît le motif final.
Le film est en soi un grand malaise. Orson Welles réfute la part autobiographique. En vain.
Le pitch : « Après des années passées en Europe, le grisonnant J.J. "Jake" Hannaford, entouré de fans et de sceptiques, tente un come-back dans un Hollywood bien changé. »
Longtemps, Welles incarne le rôle principal, en attend que John Huston l’endosse. Welles lui donne à regret ce si beau rôle. Pourtant, à n’en pas douter, Hannaford, c’est Welles.
Vous êtes un peu perdu ? Normal, et ce n’est que le début.
Via Hannaford, Welles règle ses comptes avec Hollywood et met en scène son amitié avec le réalisateur Peter Bogdanovich à travers le personnage de Brooks Otterlake. Et qui de mieux pour interpréter Otterlake si ce n’est Bogdanovich lui-même.
Malaise, je disais. Des carrières de psy ont dû se bâtir grâce à ce tournage.
Au début du documentaire, il est question de la scène des miroirs dans « La Dame de Shanghai » (note à moi-même : à voir pour ne pas passer pour un imposteur fini). J’aurais dû noter le présage.
Car sans en y prêter attention, me voilà pris dans la toile. De maître, d’ailleurs. L’histoire, non, ces histoires sont juste étourdissantes de malice et même de perversité. Et, parfois, je me demande si Orson Welles n’est pas derrière Morgan Neville.
Car sur la fin, le documentaire prend l’allure d’un thriller. Ce genre où on se dit, je me suis fait avoir comme un bleu.
Rassurez-vous, je n’en dirai pas plus. Si ce n’est une révélation tout à fait personnelle. Alors que le générique défile, Netflix me propose de regarder « De l'autre côté du vent ».
J’ignorais que le film inachevé avait été achevé. Et le hasard a voulu que je tombe en premier sur le documentaire.
Une source d’émerveillement je vous disais.