Turing : de la machine universelle au test
Enfin un biopic sur Alan Turing, comme un hommage à l'un des pères fondateurs de l'informatique mais plus indirectement de l'intelligence artificielle et des questions connexes sur la conscience et la phénoménologie de l'esprit.
Car s'il fait partie des "inventeurs" de l'ordinateur (on n'oubliera pas John von Neumann comme concepteur des bases d'architecture système lors du projet Manhattan) avec sa machine universelle, il donnera une définition de l'intelligence artificielle très originale en proposant son Test : une machine devra être considérée comme intelligente si son comportement ne peux pas être distingué de celui d'un être humain.
Cette approche "de l'extérieur", que ce qui compte ce n'est pas la nature intrinsèque de la machine, qu'elle soit vraiment dotée d'intelligence ou de conscience, mais plutôt qu'elle semble telle pour les autres, inspirera Philip K. Dick pour son roman "Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?" (Bladerunner). Puis plus tard les domaines de recherche en sciences cognitives sur l'intelligence artificielle en général et sur la nature et l'existence de la conscience en particulier.
Le film est basé sur la très documentée biographie d'Andrew Hodges, qui avait servi pour un documentaire, et fait l'objet d'une synthèse commentée, aini qu'une analyse de l'article fondateur de Turing et sa proposition de Test, dans "Vues de l'esprit" par le mathématicien Douglas Hofstadter et le philosophe Daniel Dennett. Ce dernier organise depuis longtemps le concours annuel où l'on fait passer le fameux Test de Turing : Eliza fut le premier programme informatique à le réussir en faisant croire à une majorité de juges qu'ils discutaient avec un psychothérapeute humain.
Cette approche de l'intelligence, voire de la conscience, ne prouve pas que celle-ci existe de façon immanente ou qu'il y ait un "esprit dans la machine". Elle ne le nie pas non plus.
Et le film montre aussi très bien qu'au-delà de la passion pour les jeux de l'esprit, les défis intellectuels, etc., ce qui a peut-être aussi motivé Turing pour finir par créer une machine inspirée des ses réflexions théoriques venait d'une blessure affective de ses années d'adolescence au King's College. Un besoin de retrouver un alter-ego intellectuel, mais aussi l'âme d'un être cher.