Tentative d'Inception sur public exigeant et particulièrement entraîné à résister aux intrusions.

Mon nom ? Dominick « Dom » Cobb.
Mon métier ? Extracteur.
Ma mission ? Implanter cette idée capitale dans votre cerveau : « Le film Inception est un chef d’oeuvre. » Pour ce faire, je vais devoir pratiquer une bien nommée inception sur vous. Une entreprise très risquée, que j’ai réalisée une seule fois par le passé, et qui a eu des conséquences terribles dans ma vie. Mais cette fois, je n’ai pas d’autre choix si je veux pouvoir regagner le territoire américain et revoir mes enfants depuis tout ce temps.


Bien sûr, vous n’aurez pas conscience de cette expérience, malgré vos cerveaux ultra-entraînés qui ont appris à se défendre contre leurs agresseurs.


1ère strate :


En effet, j’ai tout d’abord pris soin de m’entourer des meilleurs jeunes acteurs de ce tout début de décennie 2010 : qui n’a jamais rêvé d’avoir comme organisateur de sa mission le charismatique Joseph Gordon-Levitt, comme architecte la douce Ellen Page, l’espiègle Tom Hardy comme faussaire et le moins connu mais néanmoins important Dileep Rao en tant que chimiste ? Cette team d’enfer n’a rien à envier aux Avengers, au contraire. Dire qu’ils jouent tous extrêmement bien et qu’ils collent parfaitement à leur rôle ne serait qu’un doux euphémisme. Celui qui incarne la cible du film est tout aussi bien choisi puisqu’à l’époque où nous avons tourné Inception, il n’était pas encore la star que tout le monde connaît aujourd’hui, mais une étoile montante qui avait déjà dévoilé une partie de son talent dans Batman Begins, et qui complète parfaitement cette équipe de beaux gosses. Cillian Murphy est l’interprète idéal du fils à papa au caractère maléable, c’est d’ailleurs lui-même qui a choisi son rôle.


2ème strate :


Ensuite, j’ai veillé à ce que nos aventures soient contées et mises en image par un réalisateur de génie, le meilleur du XXIème siècle pour le moment. J’ai nommé Christopher Nolan. Qui d’autre que lui aurait été capable de pondre un scénario si compliqué sans la moindre incohérence (ou pratiquement), sans la moindre facilité scénaristique, sans la moindre faille, tout en se mettant au service d’un film à ce point divertissant et exaltant ? Qui d’autre que lui pouvait piloter d’une main de maître un montage aussi complexe mais toujours lisible et compréhensible, des effets spéciaux aussi éblouissants qui génèrent des scènes d’action dantesques et un spectacle rarement égalé en termes de mise en scène ? Il faut dire que le bonhomme était dans une période de grâce après avoir connu la gloire avec The Dark Knight, et que les studios ont eu raison de lui faire confiance en lui donnant un budget colossal, qui lui a permis d’enchaîner deux ans plus tard avec un autre chef d’oeuvre, notre chef d’oeuvre, qu’il avait mis 10 ans à écrire.


3ème strate :


Je n’ai pas non plus négligé la bande originale du film, car j’ai voulu m’entourer du fidèle acolyte du cinéaste britannico-américain, le grand Hans Zimmer. Je vous mets au défi de nommer un duo contemporain plus iconique que ces deux là : ils se comprennent parfaitement, comme se comprenaient parfaitement Sergio Leone et Ennio Morricone. Le résultat est peut-être moins impressionnant que pour la trilogie The Dark Knight, et surtout moins épique et moins original que pour l’autre immense film dont ce duo accouchera quelques années plus tard (Interstellar). Il n’en reste pas moins que je me demande s'il est vraiment possible de ne pas frissonner à l'écoute des quelques notes du morceau Time quand je marche dans l'aéroport ou du motif à la guitare électrique de Dream is Collapsing lors du climax. C’est simple : le score, omniprésent, accompagne à point nommé les moments-clés d’Inception, et sublime les images, si tant est qu'elles sont à sublimer.


Surface des limbes :


Bien entendu, il faut que je vous parle de ce qui est arrivé et pourquoi je crains de retenter l’inception sur vous. J’avais une femme, avant. Son diminutif : Mal. Nous aimions vivre dans les limbes, cet endroit où nous nous étions recréé notre monde à nous, pour échapper à la réalité. Au point que nous y avons passé énormément de temps, plus de 50 ans. C’est pourquoi Mal ne voulait plus retourner dans la vraie vie, et je ne savais pas comment la convaincre d’y revenir. Alors j’ai commis une terrible erreur : j’ai implanté une idée dans son cerveau. Une idée toute bête, toute simple, mais je n’avais pas pensé aux conséquences désastreuses que cela aurait : celle qu’elle se trouvait dans un rêve. Je pensais que cette action l’aiderait à enfin en prendre conscience, pour que je puisse profiter d’elle dans le monde réel. Le problème, c’est qu’elle s’est effectivement réveillée, mais que l’idée était toujours là. Impossible de la faire partir. Alors elle s’est dit qu’il fallait qu’elle meurt pour se réveiller pour de bon. Elle y a vraiment cru. Jusqu'au bout. C’est comme ça qu’elle s’est tuée. J’en fus tenu pour responsable et j'ai dû quitter mon pays, et donc mes enfants.


Vous comprenez donc que mon film n’est pas un simple blockbuster lambda, mais qu’il a une signification bien plus profonde, qu’il repose sur des sentiments puissants et que l'action de son personnage principal est animée et guidée par une motivation crédible et logique en tant qu’être humain. Comme si Christopher Nolan n’avait pas déjà écrit un excellent thriller de science-fiction à la fois subtil, intelligent et tonitruant, il le sublime et le saupoudre d’une histoire d’amour touchante. Je sais d’ailleurs déjà que pour vous aussi, les retrouvailles avec mes enfants à la fin du long-métrage sont le sommet émotionnel du film.


Profondeur des limbes :


Je n’évoquerai pas longtemps cette fin ouverte, qui inscrit un peu plus notre long-métrage dans la légende. Selon moi, pour paraphraser un célèbre philosophe du XXIème siècle, « la question elle est vite répondue ». Mais je comprends que toi spectateur, tu aimes élaborer toutes sortes de théories et que tu apprécies douter des choses qui te sont présentées pourtant de manière assez évidente. Qu’importe, si on parle autant du film, c’est peut-être grâce à ce dernier plan. Je ne vais pas m’en plaindre mais ça serait dommage d’oublier tous les autres arguments solides qui font d’Inception l’un des chefs d’oeuvre les plus marquants de la dernière décennie.


528491, 528491, 528491 : vous ai-je convaincu ? Il est temps de se réveiller maintenant. L’idée est en vous et vous le savez.


Au fait, vous vous souvenez de comment on est arrivé ici ?

Albiche
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le 29 juin 2020

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