Se regarde sans déplaisir.

Qu'il s'est fait tailler, cet opus, que d'ores et déjà nombre de fans du Dr Jones rejètent de la tétralogie ! Pourtant, en-dehors de certaines scènes d'action et de quelques longueurs, le cahier des charges est tenu.

Qu'a été la série Indiana Jones ? Un comic pulp transposé au cinéma, le royaume du toc, avec des légendes de bazar, des retournements de situation, de l'exotisme, des pierres à déchiffrer et des problèmes que l'on résoud tantôt avec la cervelle, tantôt à grands coups de poing. Et, bien sûr, des méchants cruels et stéréotypés. Mais à son meilleur, Indiana Jones, c'est la relecture dans un prisme américain des aventures de Tintin. Seul Les aventuriers de l'arche perdue arrivait à le faire bien, et c'est, de très loin, le meilleur film de Spielberg.

Le rythme du film est, ne nous voilons pas la face, plus lent que les autres, pour une raison évidente : l'âge d'Harrison Ford. La scène d'introduction se moque d'ailleurs de l'âge d'Indy. Plus tard, le film perd en consistance, en en refaisant, artificiellement, cet homme en téflon que l'on aime à suivre. Mais c'était une bonne idée, à mon sens, d'introduire progressivement la notion qu'Indy a envie de se reposer et laisse Mutt prendre les choses en main. Shia Laboeuf, qu'est-ce qu'il s'est fait tailler ! Je le trouvais pourtant bien en fils d'Indy, il dose bien l'arrogance immature de blanc-bec, on le sent en revanche moins mûrir qu'on ne le devrait. Mais son look à la Brando dans L'équipée sauvage ne m'a pas dérangé. Les rôles féminins ont été moins gâtés. A la première vision, j'étais heureux, comme tout fan, de retrouver la fraîcheur de Marion Ravenwood, mais le film lui donne un rôle de casse-cou plutôt que de dure à cuire, au fond c'est une potiche. De même pour la colonelle Irina Spalko, magistralement jouée par Cate Blanchett, mais à qui il manque une froideur de tueuse pour en faire un personnage vraiment crédible. Dieu sait pourtant que j'aime bien l'idée de sa mort : mourir d'un trop-plein de connaissances sur des civilisations disparues, quelle belle idée. C'est à mon avis de la faute de Spielberg, qui a toujours beaucoup mieux dirigé les acteurs hommes que les femmes.

Le film édulcore la violence, et essaie de compenser grâce à des décors et des effets impressionnants. C'est en fait une grande partie de la séquence de poursuite en Amazonie qui ne va pas. Trop longue et abusée, c'est le moment où le film déraille. La forêt est le lieu d'initiation par excellence, le lieu où l'on se révèle. Spielberg est passé à côté de quelque chose : plutôt que d'en faire un décor de parc d'attraction où l'on escrime sur des jeeps, il aurait dû faire des scènes de campement, et se cantonner aux blagues sur les serpents (la scène des sables mouvants avec le serpent est très drôle). Le dénouement m'a moins choqué. Bien sûr que c'est idiot, les extraterrestres, mais les Indiana Jones, au niveau scénario, n'ont jamais volé plus haut qu'une BD de Carl Barks (je dis cela sans mépris). Je suspends mon jugement quant à la scène de la bombe nucléaire : au premier visionnage j'avais été choqué, mais apparemment c'était une scène que Spielberg tenait à caser dans un film et ce n'est peut-être pas si bête. Les plans sur le frigo qui vole sur des centaines de mètres étaient peut-être de trop, voilà tout.

Elle est tout de même bien, cette première partie. Les Soviétiques sont les remplaçants des nazis, mais Spielberg tape des deux côtés en rappelant le contexte étouffant du Mccarthysme, et ça c'est drôlement bien. La course-poursuite en moto a toute mon adhésion, la bagarre dans le diner aussi.

Pour moi c'est un Indiana Jones, et je le préfère même au Temple maudit, qui n'était bien que dans son début et sa fin, et qui est à mon sens un des plus mauvais Spielberg (on peut l'excuser, l'homme venait de tomber amoureux de l'actrice). Finir une série n'est pas si facile, cet Indy 4 n'est pas complétement satisfaisant mais restitue dans l'ensemble la magie des opus précédents.