Attention, cette bafouille peut contenir des spoilers ! Merci de votre compréhension.
Sur le papier, Infiltrator a beaucoup de mal à cacher son opportunisme. Raconter l'histoire d'un agent infiltré dans le clan de Pablo Escobar à l'heure où la série Narcos cartonne sur Netflix, avec en plus Bryan Cranston échappé de Breaking Bad en tête d'affiche, c'est à se demander si le film n'a pas été généré par un logiciel ! A la barre, c'est Brad Furman qui signe son quatrième long-métrage, après notamment La Défense Lincoln (2011) et Players (2013). Heureusement, il est assez habile pour faire illusion sur les calculs du film et emballer un nouveau thriller d'assez bonne facture.
Du coup, ce dont Infiltrator souffre le plus, c'est seulement sur le genre balisé du flic infiltré. De manière aussi scolaire qu'efficace (le film est tout de même assez tendu de bout en bout, surtout avec sa séquence d'ouverture qui nous met tout de suite dans le bain), Brad Furman se limite aux grandes lignes du genre et fait avancer son intrigue sur les thématiques inévitables traitées cent fois : les troubles identitaires du flic infiltré, la confrontation et la soumission à la violence de la criminalité, la fragilité du foyer familial, etc. Dans l'ensemble, si le film maîtrise bien son suspens, il reste tout de même assez prévisible dans son déroulement.
Par conséquent, si Furman nous entraîne dans un récit très classique, il l'égaye cependant de quelques séquences çà et là qui rafraîchissent un peu le genre. Parmi ces nouvelles idées, celle qui est la plus émouvante et la mieux vue est de montrer à quel point les infiltrés s'attachent malgré tout aux criminels qu'ils doivent dénoncer. C'est ainsi qu'on voit le protagoniste devenir véritablement ami avec un des cadres du cartel. A sa façon subtile et incisive, Furman infiltre ainsi dans le film d'infiltré un peu d'humanité enrobant les tractations de la police et du cartel, et je me suis finalement surpris à être moins cramponné à mon siège que touché au coeur par le parcours de Robert Mazur. Un petit pas de côté émouvant par rapport au genre, qui fait d'Infiltrator un film joliment incarné derrière les masques et les identités. Et évidemment, le casting y est pour beaucoup, surtout avec Bryan Cranston toujours aussi impeccable et Benjamin Bratt qui campe un narcotrafiquant hyper sympa !
PS : pour celles et ceux qui penseraient qu'on pourrait dire exactement la même chose de Donnie Brasco, je me dois de signaler que j'ai très moyennement apprécié ce film de Mike Newell, et que je trouve beaucoup plus facile de s'attacher à un mafieux loser joué par Al Pacino qu'à des mecs du clan Escobar.