Je me suis peut-être laissé abuser par le poster psychédélique, qui me laissait espérer quelque chose de visuellement très travaillé. J'avais sans doute de trop grandes espérances, au vu du casting impeccable et des aptitudes du réalisateur, à qui je dois deux de mes films préférés (Magnolia, et l'immense There Will Be Blood). Pour moi, cela ne faisait aucun doute : ce serait, au minimum, un très bon film (du fait d'une mémoire défaillante, j'ai même acheté le blu-ray deux fois : je n'avais donc pas l'ombre d'un doute à l'égard du projet).
Mais dès les premières images, c'est la douche froide. 150 très longues minutes plus tard, je dois émerger d'un film plutôt terne, mou et mal structuré. Bien sûr, l'artiste a parfaitement le droit de se faire plaisir. Mais le n'importe quoi n'implique pas forcément la vacuité... Surtout on se demande ce qui est arrivé au réalisateur, habituellement exigeant et apte à donner véritablement chair à ses personnages (inoubliables Daniel Plainview et Paul/Eli Sunday, poignants Linda Partridge et Phil Parma, et même l'agaçant Dirk Diggler de "Boogie Nights" qui m'avait assez déçu). Ici, les personnages ne s'émancipent jamais de la caricature (c'est sans doute un parti-pris, mais sur 2h30, et avec une intrigue proche du néant, on décroche). Est-ce que ce serait exagéré de résumer "Inherent Vice" à un film potache sans envergure, ni direction ? J'ai eu l'impression de voir du sous-sous-sous-Coen ou du sous-sous-sous-Tarantino, et du coup, je me demande si les studios et les acteurs ne feraient pas mieux de re-re-relire le script avant d'accorder du crédit à un réalisateur, uniquement parce que la majorité de ses films sont des chefs-d'oeuvre... J'étais à deux doigts de décerner la note minimale, mais histoire d'effacer toute ma négativité, dès le lendemain, je me suis imposé le visionnage des Tortues Ninja, ce qui m'a permis de relativiser, et de me souvenir que la nullité de certains blockbusters vaudra toujours quelque indulgence vis-à-vis des films d'auteur, si mauvais soient-ils...