Trancher sa quête de sens artistique comme une vie et en rire.

Bon, j'ai été affreusement naïf en regardant ça. C'est exactement le genre de film que je devrais pas voir en fait : j'essayais de faire des liens entre toutes les images que je voyais, de donner un sens à tout ça, de découvrir la symbolique, et puis, à chaque fois, il partait dans une autre direction, dans une autre dimension et laissait le reste en plan, mais la famille d'animaux revenait toujours et what the fuck?

En gros, Lynch a fait une saucisse à hot-dog (qui aime ça, sérieusement ?) avec Inland Empire : il a pris des séquences qui allaient absolument pas ensemble, des bouts de films différents, en somme, les a passées au hachoir onirique inter-dimensionnel en se dirigeant vers la salle de montage et a servi ça aux avides mangeurs de fast-food que sont certains. C'est n'importe quoi, mais en pas l'fun et en mal fait. J'ai vu ni fil conducteur ni réelle trame narrative (y'en a sûrement un et une, mais lire plus loin). On peut peut-être faire un lien entre quelques bouts, mais finalement, y'a pas trop d'histoire et on regarde un truc qui va partout et nulle part à la fois.

J'aime bien les délires, mais j'aime aussi quand je sens qu'ils sont à peu près cohérents et là, bah, j'ai plutôt eu l'impression d'assister à un collage raté. Oui, le rêve, ok, mais une trame globale, please ? Mulholland Dr., même si j'ai pas tout compris et que je devrais le revoir, a le mérite de raconter quelque chose et d'en venir à bout, de conclure. Là, j'ai pas eu ce sentiment-là, redondance de là. Les retournements nous lancent ailleurs sans trop qu'on comprenne pourquoi, mais surtout sans conclure. Donc, tout ça pour rien, en somme.

Sinon, au départ, on était pas censé distribuer le film (en faire un feature film, mais je sais pas comment traduire ça. Lynch a découvert le lien qui unissait tous les bouts plus tard). Je dis peut-être ça parce que je suis de mauvaise foi, mais un réalisateur qui sait pas a priori ce qu'il veut raconter, c'est louche. On doit aussi le titre au fait que Laura Dern soit mariée avec un gars venant du Inland Empire, ce qui sonne effectivement bien, mais ça fait titre de scrap-book. L'ambiance est a peu près le seul élément réussi du film. Ah, et le polonais.

Anyway, je me suis bien fait avoir par une peut-être blague et j'en ris, mais le film est mauvais et cet épisode de ma vie me fait penser à ces fans plein de merde de Tool qui voient toujours des révélations mystiques dans les paroles de Maynard James Keenan et qui, après, jouent les fanatiques religieux en invectivant les autres fans hérétiques suggérant qu'ils sont des imbéciles qui ont rien compris à la profondeur du génie de leur chanteur préféré. Quand un fan a demandé à Keenan de lui révéler le sens de la chanson Schism, celui-ci a répondu avec irritation qu'elle parlait de Tetris ("I know the pieces fit 'cause I watch them fall away.") ou comment dire à quelqu'un de nous laisser tranquille et de chercher lui-même, longue anecdote. Bref, j'étais un peu comme le séide ridicule et j'ai longtemps écarquillé les yeux avant de comprendre que c'était un mauvais ragout. Délire indigeste, donc.

Je me suis aussi profondément ennuyé, mais c'est une autre histoire. C'est beaucoup trop long pour rien, ça s'allonge, le montage est lent, etc. Contemplatif, peut-être ; participe à l'ambiance, peut-être, mais comme l'ambiance angoissante est tout ce qu'on retient vraiment, c'est un peu sans intérêt parce que qu'est-ce qu'on doit contempler ? Bon, on retient des scènes pour leur côté impressionnant, mais pas parce qu'on comprend la logique qui fait qu'elles sont là et Lynch, qui semble-t-il, sait pourquoi A+Z+B'=Inland Empire, fait ici figure d'autiste. Déchiffrer sa logique est aussi amusant pour le neurotypique non-initié que je suis que de me faire réveiller par une alarme d'incendie à 1h du matin à Dresde quand tout ce que je veux, c'est dormir.

Lalala : je connais mal Lynch et ses trips du haut des deux petits films que j'ai vus de lui, mais bon, si on organise une projection privée de cette chose-en-italique-pour-plus-de-contraste près de chez moi et qu'on m'invite, je passe mon tour.

Disclaimer venu trop tard : c'est critique est redondante.
Megillah
2
Écrit par

Créée

le 28 janv. 2011

Critique lue 887 fois

13 j'aime

4 commentaires

Megillah

Écrit par

Critique lue 887 fois

13
4

D'autres avis sur Inland Empire

Inland Empire
Sergent_Pepper
7

Empire likes back

Aborder l’Empire intérieur exige du spectateur de nombreuses qualités, et poussées à un extrême auquel il n’est pas coutumier : patience, endurance, lâcher prise, tolérance, voire indulgence seront...

le 11 juin 2017

70 j'aime

3

Inland Empire
Extraphile
10

Aux frontières du dilemme de notre Empire Intérieur

Inland Empire, représente l’apogée du travail de Lynch, d’un point de vue de la réflexion de l’âme, de la description du jeu permanent entre le réel et le subconscient, et bien d’autres thématiques...

le 3 août 2014

53 j'aime

14

Inland Empire
S_Plissken
5

Critique de Inland Empire par S_Plissken

Sur l'échelle des valeurs 5 semble être la meilleure note. Si l'on regarde alors le motif on s'aperçoit qu'il y a autant d'étoiles jaunes que d'étoiles vides. Le barème devient donc une curseur de...

le 20 déc. 2010

39 j'aime

3

Du même critique

Soleil vert
Megillah
3

Comment déguster un ragoût de boeuf gorgé de whisky avec un excès de sourire pour plus tard traiter

Je voulais voir ce film-là depuis un bout et là, j'avoue que je m'attendais pas à ce que ça ait l'air aussi bâclé. On est en 2022. On nous montre une ville de New-York débordant de ses 40 millions...

le 14 oct. 2010

34 j'aime

9

Rhinocéros
Megillah
6

Brrr...

Rhinocéros : Ça se lit bien, ça coule, mais ça manque de folie. La folie est importante dans l'absurde. J'aurais voulu rire un peu ou, au moins, être surpris, dérouté. Là, c'est assez linéaire et on...

le 19 oct. 2010

15 j'aime

Dracula
Megillah
6

Poor, poor dear Madam Mina's poor dear suffering fellow of a husband Jonathan Harker.

L'influence du Dracula de Stoker sur le mythe des vampires est évidente puisqu'il a cristallisé une vision des suceurs de sang qu'on a à peu près toujours 113 ans plus tard (moins le côté...

le 21 déc. 2010

13 j'aime

6